Napoléon Caron, Deux voyages sur le Saint-Maurice, Trois-Rivières, Librairie du Sacré-Coeur, 1889.
L'abbé Napoléon Caron (1846-1932) était chanoine à la paroisse Immaculée-Conception de Trois-Rivières. Il a publié en 1889, sous le titre "Deux voyages sur le Saint-Maurice" le récit de voyages qu'il a effectués en Mauricie en 1887 et 1888 avec Monseigneur Louis-François Laflèche, évêque du diocèse des Trois-Rivières.
Quand l'abbé Caron a descendu la rivière, en 1888, les villes de Grand-Mère, Shawinigan et Shawinigan-Sud n'existaient pas encore. Les chutes de La Grand-Mère et de Shawinigan étaient des obstacles infranchissables qu'il fallait contourner par le portage du canot. Entre les deux, il y avait aussi un autre portage, celui du rapide des Hêtres qu'il était trop risqué de descendre en embarcation légère. À cet endroit, la rive Est de la rivière appartenait à la paroisse de Mont-Carmel et la rive Ouest à celle de Sainte-Flore.
En 1888, les deux rives étaient encore boisées et presque inhabitées; il y avait bien quelques fermes mais les villages avaient été construits plus loin à l'intérieur des terres et n'étaient donc pas visibles de la rivière. Mon arrière-grand-père Adélard Lavergne (photo ci-contre) possédait des terres dans la paroisse de Sainte-Flore, passé le rapide des Hêtres. Napoléon Caron parlait peut-être de ses vaches, ou de celles de son père Louis Lavergne, quand il écrivait : "les vaches qui ruminent tranquillement sur le rivage nous font bien voir que les habitations ne sont pas très éloignées".
L'abbé Napoléon Caron (1846-1932) était chanoine à la paroisse Immaculée-Conception de Trois-Rivières. Il a publié en 1889, sous le titre "Deux voyages sur le Saint-Maurice" le récit de voyages qu'il a effectués en Mauricie en 1887 et 1888 avec Monseigneur Louis-François Laflèche, évêque du diocèse des Trois-Rivières.
Quand l'abbé Caron a descendu la rivière, en 1888, les villes de Grand-Mère, Shawinigan et Shawinigan-Sud n'existaient pas encore. Les chutes de La Grand-Mère et de Shawinigan étaient des obstacles infranchissables qu'il fallait contourner par le portage du canot. Entre les deux, il y avait aussi un autre portage, celui du rapide des Hêtres qu'il était trop risqué de descendre en embarcation légère. À cet endroit, la rive Est de la rivière appartenait à la paroisse de Mont-Carmel et la rive Ouest à celle de Sainte-Flore.
En 1888, les deux rives étaient encore boisées et presque inhabitées; il y avait bien quelques fermes mais les villages avaient été construits plus loin à l'intérieur des terres et n'étaient donc pas visibles de la rivière. Mon arrière-grand-père Adélard Lavergne (photo ci-contre) possédait des terres dans la paroisse de Sainte-Flore, passé le rapide des Hêtres. Napoléon Caron parlait peut-être de ses vaches, ou de celles de son père Louis Lavergne, quand il écrivait : "les vaches qui ruminent tranquillement sur le rivage nous font bien voir que les habitations ne sont pas très éloignées".
Je reproduis des extraits du récit de l'abbé Caron pour sa description du parcours de la rivière, malgré ses défauts, dont le principal est la manie qu'il avait de renommer les choses selon sa fantaisie : un canot devient une pirogue, une rivière est un fleuve, un draveur est un flotteur et un billot est une bûche. L'embarcation utilisée par Caron était un canot d'écorce, une embarcation légère conçue pour faciliter le portage. Il appelle le Saint-Maurice fleuve plutôt que rivière par patriotisme (sic) à cause de sa largeur. Les pièces de bois qu'il nomme bûches étaient des billots de pin de 12 pieds de long qui servaient à la construction maritime. Notez aussi une erreur de géographie dans son récit : la montagne des Hêtres, où j'ai joué dans mon enfance, se trouve du côté ouest de la rivière, autrefois Sainte-Flore, et non pas du côté de Mont-Carmel.
Malgré ces quelques défauts, le récit de l'abbé Caron mérite d'être lu parce qu'il nous livre une belle description de la rivière Saint-Maurice à son état naturel, avant l'urbanisation de ses rives. C'est pourquoi j'ai pris le temps d'en retranscrire une partie sur ce blog. Voici l'extrait qui commence à la page 201 du livre :
(...) Vous êtes-vous déjà demandé à quel endroit le Saint-Maurice est le plus beau? Eh bien! Je peux vous répondre en toute sûreté que c'est en haut du rapide des Hêtres et nous sommes actuellement en cet endroit. Ici les côtes ne sont pas très élevées, mais elles sont couvertes d'arbres choisis qui forment une bordure magnifique. Le courant est assez rapide, et l'eau paraît couler à pleins bords. La rivière a plus de quinze arpents de large. Oui, le Saint-Maurice est beau dans cette partie de son cours, il est beau comme le Saint-Laurent lui-même; croyez, cher lecteur, que je tire cette comparaison du plus profond de mon coeur de patriote canadien.
Une grande batture s'étend devant nous : c'est la batture des Hêtres; veuillez bien retenir ce nom.
Une chose ici me surprend beaucoup : Quand nous sommes partis des Piles, nous avions vent arrière; le vent n'a certainement pas changé de direction, et voilà cependant qu'il souffle à l'avant de notre pirogue. Le fleuve va donc ici du sud au nord (...) Il faut remarquer que le Saint-Maurice ne tarde pas à reprendre sa direction ordinaire.
Les terres nous paraissent bien belles à l'endroit où nous sommes, et en avançant un peu nous nous trouvons vis-à-vis une pointe déboisée.
Nous entendons bûcher dans la forêt: ce sont des habitants de Sainte-Flore qui sont occupés à lever de l'écorce de Pruche. La paroisse de Sainte-Flore s'étend jusqu'au pied du rapide que nous allons maintenant apercevoir.
Nous voici à l'île des Hêtres qui prend son nom du rapide qui l'avoisine, car pour des hêtres, il est bien douteux qu'elle en porte un seul. Cette île est assez grande pour former un établissement, et la terre y paraît être de bonne qualité.
Mais écoutez ce bruit que nous apporte la brise : c'est le rapide qui chante pour endormir la grande forêt. Nous abordons ici car le rapide des Hêtres n'est pas un petit bonhomme qu'on puisse mépriser : on le brave avec de grands canots ou des barges, mais pour notre petite pirogue, il faut qu'elle évite le géant sous peine d'être broyée dans ses bras redoutables.
Donc, il faut faire un nouveau portage. Comptez bien sur vos doigts : c'est le troisième, n'est-ce pas? depuis le pied des Grandes Piles.
Enfin nous débouchons sur la rivière, au pied du rapide des Hêtres.
Ce rapide prend son nom des hêtres qui se trouvent sur une montagne voisine du côté de Notre-Dame du Mont-Carmel. Il a plus de hauteur que les Grandes-Piles, plus aussi que les Petites Piles, mais la pente des eaux y est un peu plus douce. M. Elzéar Guérin qui le sautait en 1871, le qualifiait ainsi : "Pas plus formidable que les Petites Piles, mais beaucoup plus embarrassé. Selon la mode suivie sur le Saint-Maurice, le rapide des Hêtres est partagé en trois courants; celui du milieu est le plus considérable. Au bas, le mouvement des eaux est terrible à voir".
(...) Le fleuve est toujours large et beau; le pays paraît un peu sauvage, mais les vaches qui ruminent tranquillement sur le rivage nous font bien voir que les habitations ne sont pas très éloignées.
En regardant devant nous, il nous semble que la rivière se trouve brusquement bouchée à quelques arpents de nous ; cela se voit de temps en temps sur le Saint-Maurice, car il lui arrive de changer subitement de direction, comme un homme qui a perdu sa route.
Il y a quelques îles sans importance qui se trouvent ici sur notre passage. Et comme j'aperçois, sur notre droite, une pointe de terre bien plane, bien boisée d'ormes, de frênes et d'érables, je demande à mon guide comment on appelle ce superbe endroit; il me répond : "C'est la pointe-à-Bernard (...)
Mais qu'y a-t-il donc? On peut à peine comprendre quelle est la direction du fleuve : il serpente, il se perd au milieu de plusieurs îles verdoyantes. Sachez bien le comprendre, mon cher lecteur : le Saint-Maurice se cache, il se recueille; parce qu'il médite son chef-d'oeuvre ; encore un instant, en effet, et il va former son Niagara, la la belle chute de Chawinigane.
Nous passons le premier pilier des estacades, qui paraît là comme la première sentinelle d'un camp bien tenu. La maison de M. Basile Thibault s'élève blanche et coquette au milieu d'une nature sauvage. À notre droite s'avance une crête de rocher couverte de jeunes arbres, à notre gauche le fleuve, qui a réuni ses eaux, forme une anse magnifique. (...)
Tout vaisseau qui descend ou qui remonte le Saint-Maurice doit faire portage à Chawinigane. (...) M. Maurice, son canot sur la tête, prit la droite en s'accrochant aux branches pour grimper (...) Au bout de quelques instants, nous étions en face de la baie de Chawinigane. Des milliers de bûches la couvraient littéralement, attendant au sein d'une espèce de sommeil que les flotteurs les dirigeassent dans le courant, pour les descendre vers les scieries de la ville ... Nous sommes obligés d'écarter les bûches pour nous frayer un passage, c'est une besogne lente et qui demande beaucoup de précautions, surtout quand on n'est séparé des flots que par l'épaisseur d'une fragile écorce. Mais nous tombons enfin dans un espace libre, et alors nous cinglons rapidement vers la maison de M. Arthur Rousseau, gardien des estacades. Tout en marchant, nous regardons avec une espèce de frayeur l'énorme quantité de sable qui s'est déposée cette année dans la baie de Chawinigane.
On peut lire "Deux voyages sur le Saint-Maurice" en ligne sur le site Nos Racines (ici)
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