mardi 27 décembre 2011

Le sens du courant

Quand le Saint-Laurent était encore la principale voie de communication, on disait monter à Montréal et descendre à Québec, selon le sens du courant. Même chose pour le Saint-Maurice : on montait à La Tuque et on descendait à Trois-Rivières.

Ces expressions sont demeurées en usage bien après le développement du réseau routier et la fin du transport fluvial des passagers. On les utilisait encore dans les années 1950-1960.

Le premier bateau à vapeur au Canada, et un des premiers dans le monde, a été construit par le brasseur John Molson de Montréal en 1809. Les pièces du moteur ont été moulées aux Forges du Saint-Maurice près de Trois-Rivières. Le vapeur Accomodation a commencé son voyage inaugural de Montréal à Québec le 19 août 1809. Le lendemain, il s'est arrêté à Trois-Rivières pour prendre à son bord les ouvriers des Forges qui avaient fabriqué son énorme moteur. Ils devaient procéder aux derniers réglages (voir Quand Molson construisait des bateaux sur L'Actualité.com).

Le sens du courant marquait aussi le nom des lieux : Rivière-du-Loup-en-haut (aujourd'hui Louiseville), en Mauricie, était située en amont de Rivière-du-Loup-en-bas, dans le Bas-du-Fleuve.

vendredi 23 décembre 2011

Le retour du prince

Récitez à haute voix en roulant les r : « Montréal, ô ma ville, tu as voulu te faire belle pour recevoir ton pasteur et ton prince! »

En janvier 1953, Paul-Émile Léger (1904-1991), archevêque de Montréal, a été nommé cardinal par le pape Pie XII. À son retour du Vatican, le 29 janvier 1953, il faisait une apparition triomphale à la gare Windsor de Montréal à bord d'un wagon réservé par le Canadien Pacique.  On trouve un reportage radiophonique de cet événement sur le site de Radio-Canada.

Les fidèles s'était massés à l'intérieur de la gare pour l'acclamer avec des banderoles. Le charme a été rompu quand il a prononcé ces paroles : « Montréal, ô ma ville, tu as voulu te faire belle pour recevoir ton pasteur et ton prince! » (à 23 minutes et 45 secondes du reportage). La foule découvrait la vanité de son héros. Le reste de son allocution était de la même eau : « Depuis que le Saint-Père a fait de moi votre cardinal vous ne savez pas comment m'exprimer ce que vous ressentez. »

Paul-Émile Léger dira plus tard qu'il regrettait beaucoup ces paroles. Il a démissionné de son poste d'archevêque le 20 avril 1968 pour travailler comme missionnaire en Afrique auprès des lépreux et des enfants handicapés. Il a réalisé d'importantes levées de fonds pour financer ses missions qu'on appelait « les oeuvres du cardinal ».

On entendait sa voix le soir à la radio de CKAC réciter les prières du chapelet en famille.

jeudi 22 décembre 2011

Le Bonhomme sept-heures

Autrefois, les rebouteux, ramancheurs ou ramancheux étaient aussi désignés sous le nom anglais de « bone setter ». Ces soigneurs n'avaient pas de formation médicale mais ils pouvaient, grâce à leur dextérité, replacer des os fracturés ou déplacés. C'était évidemment très douloureux et les enfants qui entendaient les clients hurler avaient très peur du « bone setter ».

Les mères menaçaient leurs enfants qui n'étaient pas sage d'aller chercher le « bone setter » pour les punir. Le terme s'est ensuite francisé pour devenir Bonhomme sept-heures, le méchant qui punissait les enfants désobéissants qui rentraient trop tard le soir. C'est ainsi que les langues évoluent, par des emprunts qui sont adaptés aux contexte local.


C'est une explication plausible de l'origine d'un personnage que l'on retrouve dans plusieurs légendes du Canada français et qui se promenait avec un grand sac dans lequel il enfermait les enfants. 

Certains croient que l'origine du personnage serait plus ancienne et viendrait du breton Bonhomme basse heure. C'est ce qui expliquerait qu'on retrouve aussi des histoire de Bonhomme sept-heures en Acadie.

L'image du Bonhomme sept-heures est une acrylique qui provient de ce site. Je n'en connais pas l'auteur.

dimanche 11 décembre 2011

Minuit ! Chrétiens

Minuit ! Chrétiens a été composé en 1847 par Adolphe Adam sur un texte de Placide Cappeau écrit à la demande du curé de Roquemaure. C'est sans doute le cantique français le plus apprécié du répertoire de Noël. On peut lire la petite histoire de cette composition ici.

Le Minuit ! Chrétiens était aussi le cantique de Noël préféré au Canada français. À l'église, lors de la messe de minuit, le meilleur chanteur de la chorale, généralement un ténor, l'entonnait à minuit pile. C'était le moment magique de la messe de minuit.

La version qui a été la plus populaire sur disque est celle enregistrée en 1948 par le ténor Raoul Jobin (1906-1974), une interprétation mémorable avec un orgue et la chorale des Disciples de Massenet. Je crois que personne ne l'a chanté aussi bien que lui. De nombreuses familles avaient ce disque à la maison en 78 tours ou plus tard en 45 tours. Vous pouvez l'écouter ici.

L'interprétation du ténor Richard Verreau (1926-1977), enregistrée en 1959 avec choeur et orchestre, était aussi très populaire (ici). Une belle performance, mais je préfère celle de Jobin.

Ce cantique a été interdit pendant un certain temps par l'Église catholique. On disait que c'était devenu une chanson profane chantée dans des lieux de perdition comme les tavernes. En réalité, l'interdiction était plutôt due à une problème théologique au sujet de cette phrase : Pour effacer la tache originelle et de son Père arrêter le courroux. C'est un peu compliqué. Si j'ai bien compris, c'est le baptême qui rachète le péché originel et non pas la venue du Christ sur terre. L'idée du Père colérique qu'il faut apaiser par un sacrifice est aussi contestable. L'auteur Patrice Cappeau qui avait écrit ces paroles sous l'influence du curé de Roquemaure a voulu corriger son texte, mais il était trop tard, la chanson avait déjà fait son chemin.

Voici la version originale qui comprenait trois couplets. Le couplet central, dont les paroles se chantent plutôt mal, est habituellement escamoté :

Minuit  ! Chrétiens, c’est l’heure solennelle
Où l’homme Dieu descendit jusqu’à nous,
Pour effacer la tache originelle
Et de son Père arrêter le courroux :
Le monde entier tressaille d’espérance
À cette nuit qui lui donne un Sauveur
Peuple, à genoux attends ta délivrance,
Noël  ! Noël  ! Voici le Rédempteur  !
Noël  ! Noël  ! Voici le Rédempteur  !
(Chœur)
Peuple, à genoux attends ta délivrance,
Noël  ! Noël  ! Voici le Rédempteur  !
Noël  ! Noël  ! Voici le Rédempteur  !

De notre foi que la lumière ardente

Nous guide tous au berceau de l’enfant
Comme autrefois, une étoile brillante
Y conduisit les chefs de l’Orient
Le Roi des Rois naît dans une humble crèche,
Puissants du jour fiers de votre grandeur,
Ah ! votre orgueil c’est de là qu’un Dieu prêche,
Courbez vos fronts devant le Rédempteur  !
Courbez vos fronts devant le Rédempteur  !
(Chœur)
Ah ! votre orgueil c’est de là qu’un Dieu prêche,
Courbez vos fronts devant le Rédempteur  !
Courbez vos fronts devant le Rédempteur  !

Le Rédempteur a brisé toute entrave,
La terre est libre et le ciel est ouvert
Il voit un frère où n’était qu’un esclave
L’amour unit ceux qu’enchaînait le fer,
Qui lui dira notre reconnaissance  ?
C’est pour nous tous qu’Il naît, qu’Il souffre et meurt :
Peuple, debout ! chante ta délivrance,
Noël  ! Noël  ! chantons le Rédempteur  !
Noël  ! Noël  ! chantons le Rédempteur  !