mercredi 17 février 2010

Trinidad à Cuba

La ville de Trinidad à Cuba est située dans la province de Sancti Spiritus sur le bord de la mer des Caraïbes. On s'y rend par une route étroite et sinueuse qui serpente les collines. Les courbes sont dangereuses. C'est une région montagneuse, le massif de l'Escambray. Lors de la révolution cubaine, des opposants contre-révolutionnaires s'étaient réfugiés dans ces montagnes. Ils en ont été délogés par l'armée castriste quelques années plus tard. L'histoire officielle les appelle Les Bandits.

La ville et la vall
ée de Los Ingenios qui l'entoure ont été classées en 1988 au patrimoine mondial de l'UNESCO, comme la ville de Québec. La valeur patrimoniale de Trinidad repose sur l'architecture de ses bâtiments qui est typique de l'époque coloniale espagnole; on y distingue même une influence mauresque. Celle de la vallée à trait au paysage et à son importance historique dans le développement de l'industrie sucrière.

Trinidad a été fondée en 1514 par le conquistador espagnol Diego Velasquez qui était alors gouverneur de Cuba. C'est la troisième ville la plus ancienne de l'île. Ce fut pendant longtemps un repaire de pirates et de marchands d'esclaves. Mais il ne subsiste plus rien de cette époque. Les édifices anciens que l'on peut voir aujourd'hui datent plutôt des 18e et 19e siècles. Ils ont été construits pendant la période de prospérité de l'industrie de la canne à sucre sur laquelle reposait l'économie de la ville. Cette culture est aujourd'hui disparue de la vallée de Los Ingenios. On peut en admirer les paysages à partir d'un belvédère "Le Mirador" qui a été aménagé à quelques kilomètres de la ville (photo ci-contre).

C'est l'absence de développement économique dans cette partie de l'île qui a permis la conservation du vieux Trinidad. Il n'y avait pas de route carrossable pour s'y rendre avant la révolution. Il reste encore beaucoup à faire pour aménager la vieille ville. Plusieurs édifices anciens n'ont pas encore été restaurés. L'UNESCO a ouvert une école à Trinidad pour apprendre aux jeunes Cubains les connaissances techniques requises pour l'entretien des bâtiments. Elle finance aussi une partie des coûts de la restauration.

Le secteur le mieux restauré est celui de l'église paroissiale Mayor Santisima Trinidad (Sainte-Trinité) devant laquelle on a aménagé une belle place publique. On trouve dans cette église, qui n'est pas très ancienne (1892), plusieurs belles pièces d'ébénisterie : des autels, un jubé, un confessionnal, un christ gisant derrière une vitrine. Autour de l'église, on aperçoit les principaux bâtiments anciens qui ont retrouvé leur état originel.

Curieusement, les rues de la vieille ville ont été pavées avec des pierres des champs rondes et de taille variable, ce qui rend la surface inégale et la marche un peu difficile. Il faut regarder où l'on met les pieds.

On trouve près de l'église une magnifique résidence, le Palacio Brunet, qui a été construite en 1812 dans un style rococo. Elle abrite le musée du Romantisme qui présente du mobilier et des objets ayant appartenu à la bourgeoisie locale au temps des plantations. Plusieurs familles françaises riches, dont les Brunet, se sont installées à Trinidad après avoir été chassées d'Haïti lors de la guerre d'indépendance (1791-1803). Elles ont participé au développement de l'industrie sucrière. La cour intérieure du Palacio Brunet est très représentative du style colonial espagnol. Elle donne accès à une tour de guet dans laquelle on peut monter pour voir un panorama de la ville et des environs avec en arrière-plan les montagnes du massif de l'Escambray.

Il y a d'autres musées que je n'ai pas visités : le Musée municipal, le Musée national de la lutte contre Les Bandits (sic), un musée d'archéologie et un musée d'architecture. Ils sont situés tout autour de l'église paroissiale.

Un peu plus loin, un temple consacré au vaudou cubain, le Santeria, où des descendants d'esclaves africains pratiquent leur culte. C'est très rudimentaire comme temple : une poupée en plastique représentant une Vierge noire devant un petite table en bois couverte d'une nappe qui tient lieu d'autel, des récipients en verre et un crucifix. Le tout pouvait être déménagé en quelques minutes, ce qui était bien pratique quand la religion était réprimée. J'ai été surpris d'apprendre que plusieurs centaines de milliers de fidèles cubains suivent des rites d'inspiration africaine. Il y aurait d'ailleurs un accroissement de la pratique religieuse dans l'île depuis l'effondrement de l'économie cubaine qui a été provoqué par la disparition de l'Union Soviétique.

En dehors du vieux quartier, Trinidad ressemble aux autres villes cubaines. La population ne prête guère attention aux touristes, sauf une dizaine de mendiants qui sont assez collants : une jeune fille d'une dizaine d'années qui se gonfle le ventre pour faire croire qu'elle est enceinte, une autre qui réclame à grands cris des caramels, une vieille vraiment tache qui répète sans cesse le mot peso. Les Cubains, qui sont des gens fiers, méprisent leurs compatriotes qui mendient. Les touristes qui courent après les enfants pour leur donner des cadeaux ne se rendent pas compte du tort qu'ils leur font.

Avant d'entrer dans le vieux quartier, on peut voir un magasin d'État où les habitants se procurent, une fois par mois sur présentation d'un carnet de rationnement, quelques aliments de base comme le riz, le sucre et les oeufs. Il n'y a pas grand chose. Les Cubains complètent leur alimentation en cultivant un potager et en faisant du troc.


Depuis quelques années, le gouvernement cubain permet, sous certaines conditions, le travail indépendant, ce qui améliore un peu le niveau de vie. On peut visiter à Trinidad un atelier de potier qui est exploité par des artisans de la ville. On trouve aussi des petits commerces indépendants : des restaurants où l'on sert de la langouste, des chambres à louer dans les maisons de la ville, un marché extérieur où l'on vend des souvenirs aux touristes. Mais la libéralisation de l'économie est encore embryonnaire. Cuba demeure un état communiste.

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