Un poème que j'ai mémorisé pour le réciter dans un cours de littérature française vers 1970. Il raconte l'histoire d'un ivrogne qui a choisi le vin plutôt que sa femme. Je crois que c'est l'humour morbide du texte de Beaudelaire qui avait plu à l'adolescent que j'étais à l'époque.
Pour l'humour morbide, j'aimais bien celui du troisième quatrain : "autant de vin qu'en peut tenir son tombeau ; ce n'est pas peu dire." Pour le macabre et le mépris de la mort : "Le wagon enragé peut bien écraser ma tête coupable ou me couper par le milieu, je m'en moque comme de Dieu, du Diable ou de la Sainte Table !"
Le vin de l'assassin a été publié dans le recueil "Les Fleurs du mal "en 1857. Léo Ferré en a fait une chanson (ici).
Le vin de l'assassin
Ma femme est morte, je suis libre !
Je puis donc boire tout mon soûl.
Lorsque je rentrais sans un sou,
Ses cris me déchiraient la fibre.
Autant qu’un roi je suis heureux ;
L’air est pur, le ciel admirable..
Nous avions un été semblable
Lorsque j’en devins amoureux !
L’horrible soif qui me déchire
Aurait besoin pour s’assouvir
D’autant de vin qu’en peut tenir
Son tombeau ; — ce n’est pas peu dire :
Je l’ai jetée au fond d’un puits,
Et j’ai même poussé sur elle
Tous les pavés de la margelle.
— Je l’oublierai si je le puis !
Au nom des serments de tendresse,
Dont rien ne peut nous délier,
Et pour nous réconcilier
Comme au beau temps de notre ivresse,
J’implorai d’elle un rendez-vous,
Le soir, sur une route obscure.
Elle y vint ! — folle créature !
Nous sommes tous plus ou moins fous !
Elle était encore jolie,
Quoique bien fatiguée ! et moi,
Je l’aimais trop ! voilà pourquoi
Je lui dis : Sors de cette vie !
Nul ne peut me comprendre. Un seul
Parmi ces ivrognes stupides
Songea-t-il dans ses nuits morbides
À faire du vin un linceul ?
Cette crapule invulnérable
Comme les machines de fer
Jamais, ni l’été ni l’hiver,
N’a connu l’amour véritable,
Avec ses noirs enchantements,
Son cortége infernal d’alarmes,
Ses fioles de poison, ses larmes,
Ses bruits de chaîne et d’ossements !
— Me voilà libre et solitaire !
Je serai ce soir ivre mort ;
Alors, sans peur et sans remord,
Je me coucherai sur la terre,
Et je dormirai comme un chien !
Le chariot aux lourdes roues
Chargé de pierres et de boues,
Le wagon enragé peut bien
Écraser ma tête coupable
Ou me couper par le milieu,
Je m’en moque comme de Dieu,
Du Diable ou de la Sainte Table !
Je puis donc boire tout mon soûl.
Lorsque je rentrais sans un sou,
Ses cris me déchiraient la fibre.
Autant qu’un roi je suis heureux ;
L’air est pur, le ciel admirable..
Nous avions un été semblable
Lorsque j’en devins amoureux !
L’horrible soif qui me déchire
Aurait besoin pour s’assouvir
D’autant de vin qu’en peut tenir
Son tombeau ; — ce n’est pas peu dire :
Je l’ai jetée au fond d’un puits,
Et j’ai même poussé sur elle
Tous les pavés de la margelle.
— Je l’oublierai si je le puis !
Au nom des serments de tendresse,
Dont rien ne peut nous délier,
Et pour nous réconcilier
Comme au beau temps de notre ivresse,
J’implorai d’elle un rendez-vous,
Le soir, sur une route obscure.
Elle y vint ! — folle créature !
Nous sommes tous plus ou moins fous !
Elle était encore jolie,
Quoique bien fatiguée ! et moi,
Je l’aimais trop ! voilà pourquoi
Je lui dis : Sors de cette vie !
Nul ne peut me comprendre. Un seul
Parmi ces ivrognes stupides
Songea-t-il dans ses nuits morbides
À faire du vin un linceul ?
Cette crapule invulnérable
Comme les machines de fer
Jamais, ni l’été ni l’hiver,
N’a connu l’amour véritable,
Avec ses noirs enchantements,
Son cortége infernal d’alarmes,
Ses fioles de poison, ses larmes,
Ses bruits de chaîne et d’ossements !
— Me voilà libre et solitaire !
Je serai ce soir ivre mort ;
Alors, sans peur et sans remord,
Je me coucherai sur la terre,
Et je dormirai comme un chien !
Le chariot aux lourdes roues
Chargé de pierres et de boues,
Le wagon enragé peut bien
Écraser ma tête coupable
Ou me couper par le milieu,
Je m’en moque comme de Dieu,
Du Diable ou de la Sainte Table !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire