mercredi 27 février 2013

D'Actilia à Zélia

Tous ceux qui ont fait des recherches généalogiques au Québec ont constaté la prolifération des prénoms féminins se terminant en "a" vers la fin du dix-neuvième siècle. Souvent, on ajoutait simplement un "a", un "ina" ou un "ida" à la fin d'un prénom existant.

Azilda Leclerc (1869-1944)
On peut y voir une recherche d'exotisme, une influence des langues étrangères. Il y avait beaucoup de prénoms italiens, mais aussi d'autres d'origine biblique : Débora, Dina, Dora, Edna, Léa, Rébecca, Sara. Certains exprimaient, peut-être involontairement, un sentiment, qu'il soit céleste (Étoilia), triste (Désola), agressif (Artilla), diabolique (Évila) ou joyeux (Féria).  Mais surtout, ces prénoms sonnaient bien aux oreilles des mamans de l'époque, sans qu'elles sachent trop pourquoi. C'est bien ce qu'on appelle une mode.

Je ne sais pas si c'était un phénomène local ou encore une mode venue d'ailleurs. Il y avait aussi des prénoms en "a" à cette époque en France et aux États-Unis, mais peut-être pas autant qu'au Canada français. J'ai remarqué que l'incidence était particulièrement forte dans les familles qui ont séjourné en Nouvelle-Angleterre pour travailler dans les manufactures.

Cette vogue aura duré le temps d'une génération. Selon mes données, la grande majorité des femmes qui ont porté des prénoms en "a" sont nées entre 1860 et 1890. Certains de ces prénoms sont plus tard revenus à la mode, mais la vague était déjà passée.

J'ai trouvé 161 prénoms féminins se terminant par un "a" dans ma banque de données généalogiques. En voici la liste par ordre alphabétique avec, entre parenthèses, l'occurrence dans ma banque de données qui contient plus de 10 000 personnes de sexe féminin. Les prénoms les plus répandus étaient les plus courts : Maria, Emma, Célina, Anna et Clara.








Actilia (1) Clairina (1) Fabiana (2) Marcella (1)

Adélina (20) Clara (61) Félixina (2) Marelda (1)

Alberta (4) Clémenda (1) Féria (1) Maria (74)

Albertina (1) Cléona (1) Flora (16) Martha (2)

Albina (32) Cora (4) Florella (4) Mathilda (16)

Alda (5) Cordélia (6) Florida (27) Mauria (1)

Aldéa (19) Corona (2) Gemma (3) Médiana (1)

Alexandra (4) Débora Georgiana (22) Mélina (14)

Alexandrina (2) Délia (38) Georgina (13) Melvina (1)

Alexina (31) Délima (18) Gracia (2) Noëlla (19)

Alfréda (1) Delvina (14) Gratia (6) Norma (1)

Alida (8) Désolina (3) Grazia (1) Odilara (1)

Alma (26) Diana (22) Graziella (4) Oléda (4)

Alméria (4) Dilora (4) Graziella (4) Olida (8)

Almida (2) Dina (12) Héléna (4) Oliva (36)

Alphéda (6) Donalda (7) Hélenda (1) Onéda (8)

Alphéna (1) Donia (19) Hermédia (2) Ophélia (1)

Alphina (1) Dora (6) Ida (8) Palména (2)

Alvina (7) Dorilda (6) Imelda (6) Paméla (4)

Amanda (35) Dorilla (12) Julia (9) Parmélia (3)

Amilia (1) Edna (1) Lauda (7) Rébecca (27)

Anelda (1) Édouardina (21) Laudia (3) Régina (16)

Angélina (31) Élédia (2) Laura (41) Résina (2)

Anita (10) Élisa (11) Laurentia (1) Rosa (28)

Anna (71) Élodia (13) Lauretta (1) Rosalina (1)

Anna-Ozélina (1) Elvina (2) Léa (28) Rose-Alba (8)

Antonia (10) Émelda (2) Léda (12) Rose-Alma (15)

Arilda (1) Émélina (5) Léoda (2) Rose-Anna (47)

Armédia (6) Émilia (11) Léona (5) Rose-de-Lima (18)

Artilla (1) Emma (71) Léondina (2) Rosélia (1)

Augusta (3) Énédia (3) Léonida (2) Sara (35)

Aulida (2) Esméralda (5) Lina (3) Séréna (3)

Auréa (14) Éva (41) Lisa (3) Stella (2)

Azélia (1) Évelina (22) Lorenza (2) Théophida (1)

Azilda (30) Évila (2) Louisa (8) Thirza (1)

Bella (20) Exélina (1) Lucia (8) Valéda (7)

Bertha (12) Exilda (9) Lucinda (11) Valida (5)

Bruna (1) Exilia (11) Lumina (11) Victoria (23)

Célina (62) Exina (13) Lydia (10) Vilina (2)

Chlora (1) Exodina (6) Malvina (27) Zélia (11)







Addendum : Étoilia (1)

dimanche 24 février 2013

La scène du mouchoir

Guy Laviolette, Marie-Madeleine de Verchères, châtelaine de la Pérade 1678-1747, Collection Gloires nationales, Québec, 1944, 32 pages.

Ce fascicule appartient à la collection Gloires nationales qui regroupe une trentaine de biographies consacrées aux héros de notre histoire nationale par les Fréres de l'Instruction chrétienne (voir Nos gloires nationales sur ce blog).

Madeleine de Verchères est un personnage historique secondaire, mais elle était devenue une héroïne dans les manuels d'histoire du Canada en usage dans les années 1950 et 1960, au même titre que Dollard Desormeaux.

On retrouve dans cette biographie, destinée aux élèves du primaire, la fameuse scène du mouchoir où elle avait failli être attrapée par un Iroquois. Je me souviens qu'on avait eu peur pour elle. Qu'est-ce-que le méchant Iroquois qui voulait l'étreindre de ses bras musclés aurait pu lui faire ?

On ne connaît pas beaucoup de demoiselles qui soupirent en disant : Vierge sainte, Mère de mon Dieu ! Voici donc la scène du mouchoir qui donne un bon aperçu du style et du contenu de la collection Gloires nationales et des anciens manuels d'histoire du Canada des Frères de l'Instruction chrétienne. :  
- Sauvez-vous, Mademoiselle, sauvez-vous ! s'écrie Laviolette le vieux serviteur de la famille; les Iroquois sont à votre poursuite.
  Au fait, rampant comme une bête fauve dans les herbes du rivage, un Iroquois s'approche sournoisement de Madeleine et s'apprête à l'étreindre se ses bras musclés.
- Vierge sainte, Mère de mon Dieu, soupire l'adolescente en prenant ses jambes à son cou, vous savez que je vous ai toujours honorée, aimée comme ma chère Maîtresse; ne m'abandonnez pas dans le danger où je me trouve. J'aime mille fois mieux périr que de tomber entre les mains d'une nation qui ne vous connaît pas.
  Désespérant de saisir la jolie demoiselle vivante, les barbares déchargent leurs mousquets sur elle, mais sans résultat. L'un d'eux, habile coureur parvient à la suivre de si près qu'il saisit le mouchoir qui flottait autour de son cou. Mais la petite Canadienne, aussi rusée que le Peau-Rouge, dénoue prestement le fichu ... qui reste aux mains de l'agresseur furieux.
  Une seconde encore, et Madeleine franchit les seuil du fort en criant de toute la force de ses poumons : Aux armes !

samedi 23 février 2013

Nos gloires nationales

Les Frères de l'Instruction chrétienne (FIC) ont publié dans les années 1940 et 1950 une trentaine de biographies de nos gloire nationales, destinées aux élèves du primaire. L'auteur de toutes ces biographies est Guy Laviolette, un pseudonyme du Frère Henri Gingras F.I.C., pseudonyme choisi en l'honneur du fondateur de Trois-Rivières. Le Frère Gingras a vécu une quinzaine d'années dans cette ville.


Qui étaient ces gloires nationales ? Les héros de nos anciens manuels d'histoire du Canada du cours primaire. Ceux qui, comme moi, ont étudié chez les FIC, reconnaîtront le style et les illustrations de ces manuels des années 1950-1960 aussi écrits par Guy Laviolette.

On distingue deux séries selon le format des fascicules.

La première série a été publiée en prévision des Fêtes du tricentenaire de la ville de Montréal en 1942. Les petits fascicules, publiés par Les Éditions de l'Abeille, comptaient environ 48 pages avec des illustrations en noir et blanc. Cette première série comportait douze titres, dont six ont été repris dans la deuxième série.

À compter de 1943, le format a été changé à la demande des libraires qui voulaient des produits plus attrayants pour le marché des prix scolaires de fin d'année. La deuxième série offrait des fascicules plus grands (25 centimètres), de 32 pages, abondamment illustrés en couleurs. Plusieurs dessinateurs ont collaboré à cette série dont Louis Brouilly, Richard Frenière, Rolland Boulanger et Odette Vincent.

L'abbé Lionel Groulx, éminent historien nationaliste, offrait le témoignage suivant :


Le prix du fascicule sur Madeleine de Verchères, publié en 1944, était de 25 cents, tandis que celui sur Samuel de Champlain, publié en 1948, se vendait 35 cents.

J'ai identifié 26 personnalités dont la biographie a été publiée dans cette deuxième série des Gloires nationales, 20 hommes et 6 femmes. Curieusement, une des gloires est un personnage de fiction : l'Acadienne Évangeline, héroïne du poème épique de Longfellow. Une autre, Jean-Marie Robert de la Mennais, a vécu tout sa vie en France, mais c'est le fondateur des FIC. Par ailleurs, on compte pas moins de 10 religieux parmi les 26 gloires.

Les FIC glorifiaient l'époque de la Nouvelle-France. Pour eux, l'histoire du Canada se terminait en 1760. On passait ensuite à la géographie. Parmi les 26 gloires nationales, seuls Hippolyte Lafontaine et deux religieuses ont été actifs au Canada après la Conquête.

 






Bourgeois, Marguerite
Jolliet, Louis

Brébeuf, Jean de
La Salle, Cavelier de

Bruyère, Élisabeth
Lafontaine, Hippolyte

Cartier, Jacques
Laviolette

Champlain, Samuel
Lévis, duc de

Colomb, Christophe
Maisonneuve

Dauversière, La
Mance, Jeanne

Desormeaux, Dollard
Marie-Anne, Mère

Évangeline
Mennais, Jean-Marie de La

Frontenac
Montcalm

Iberville, Pierre Lemoine d'
Verchères, Madeleine de

Incarnation, Marie de l'
Vérendrye, La

Jogues, Isaac
Youville, Marguerite d'








Pour en savoir plus, voir : L'adolescence vue par les Frères de l'Instruction chrétienne.

vendredi 22 février 2013

Leprohon n'est pas Lampron

Rosanna Leprohon
Les Leprohon de la région de Montréal ne sont pas apparentés à la famille Lampron de la Mauricie et des Bois-Francs. Ils descendent de Jean-Philippe Leprohon né en 1731 en France, sergent du Régiment de Béarn, qui a épousé Marie-Agathe Content le 7 janvier 1760 à Montréal. L'écrivaine Rosanna Leprohon (1829-1879), née Mullins, était originaire d'Irlande. Elle a épousé le médecin Jean-Lucien Leprohon le 17 juin 1851 à l'église Notre-dame de Montréal. On trouve des articles sur trois de ses romans sur le site Laurentiana.

Pour bien compliquer le tout, certains Lampron de Nicolet ont écrit leur nom Lamprohon dans les registres au dix-neuvième siècle. En fait, je crois que c'était plutôt la faute du prêtre officiant parce que ces gens-là ne savaient pas écrire. Les variantes dans l'orthographe du nom sont nombreuses. J'ai même déjà vu Lamprond.

jeudi 21 février 2013

Deux adolescentes noyées

La noyade est une cause de décès peu commune, sauf chez les marins bien sûr. Il est hautement improbable que, dans une même famille, deux adolescentes décèdent de cette façon. On croirait une malédiction. C'est pourtant ce qui est arrivé dans la famille Lampron, mais il faut préciser que les deux noyades sont survenues à 137 ans d'intervalle. Cette coïncidence m'avait frappé quand j'effectuais des recherches sur cette famille, il y a une vingtaine d'années.

La seconde victime, prénommée Marguerite, était l'arrière-petite-nièce de la première, prénommée Marie-Anne :

- Le 31 mai 1684, Marie-Anne Laspron, âgée de 14 ans, fille de Jean Laspron et d'Anne Renaud, s'est noyée dans la rivière Cressé à la Baie-du-Fèbvre. Elle a été inhumée dans le cimetière de Trois-Rivières le 4 juin de la même année. L'acte de sépulture de Marie-Anne est presque illisible.

- Le 14 octobre 1821, Marguerite Lampron, âgée de 16 ans, fille d'Antoine Lampron et de Madeleine Deserres, s'est noyée par accident dans la Rivière-du-Loup. Elle a été inhumée à Yamachiche deux jours plus tard. L'officiant a cru bon de préciser dans l'acte que la noyade était accidentelle.

Voici comment on peut situer les victimes dans les cinq premières générations de Lampron en Amérique :

1. Jean et Anne Renaud
2.1 Marie-Anne (1670-1684)
2.2 Claude et Marguerite Foucault
3. Pierre et Agathe Sicard
4. Antoine et Madeleine Desserres
5. Marguerite (1806-1821).

mercredi 20 février 2013

De choses et d'autres (2)

- J'ai ajouté un huitième commandement dans Les commandements du généalogiste. Je finirai bien par en avoir dix.

- L'évolution des patronymes résulte souvent d'une perte de sens. Ainsi, Prénouveau, le surnom des Rouillard, est devenu Pronovost parce que plus personne ne se souvenait du pré en question. Même chose pour Saintonge qui a été sanctifié en St-Onge quand le souvenir de la province d'origine en France s'est estompé. Ajoutons Chesnay dont le sens s'est perdu, parce qu'il n'y avait pas de forêt de chênes en Nouvelle-France, et qui s'est déformé en Chainé. Par contre, le patronyme Tremblay s'est maintenu.

- Les anciens indicateurs de chemin de fer sont une source d'informations sur les localités desservies et sur leurs habitants. Voir : Indicateur (directory) des villes et villages sur le chemin de fer Québec, Montréal, Ottawa & occidental et ses embranchements - donnant une description des places environnantes, des distances et des moyens de communication avec les gares de ce chemin. Compilé par John A. Watkin, Fauteux et Cie, Montréal, 1880. Ici

lundi 18 février 2013

La galette de matelot

Une des délicatesses consommées autrefois dans les camps de bûcheron était le biscuit de matelot, aussi appelé galette de matelot. Comme son nom l'indique, ce biscuit de mer a été conçu pour se conserver durant les longues traversées. On en apportait aussi dans les chantiers pour servir de féculent quand le pain venait à manquer.

Source : Honfleurissimo


Ce met, dur comme du bois, était produit autrefois, sous le nom de « capitaine », par la biscuiterie J.N. Godin de la rue Notre-Dame à Trois-Rivières. Il paraîtrait que les écureuils en raffolaient, leur dentition permettant de le croquer sans le faire tremper. Voici ce qu'en disait un article du  journal Le Nouvelliste du 9 décembre 1950, qui citait l'entrepreneur Jean Crête, surnommé le Roi de la Mauricie :

Vers 1900.

Les six hommes du camp (parfois 8) partageaient à tour de rôle la mission d’allumer le poêle avant le repas et d’y faire réchauffer les fèves au lard et la soupe aux pois. Un autre allait quérir de l’eau ou s’assurait que la quantité de bois de chauffage était suffisante jusqu’au lendemain.

Dans les petits camps, où il n’y avait pas de cuisinier, la pain acheté au magasin de Crête avait été consommé rapidement. Il fallait alors se contenter de la « galette de matelot ». Jean Crête se rappelle avoir fait venir de la biscuiterie de J.-N. Godin aux Trois-Rivières de pleins wagons de cette galette au goût exquis qui portait le nom de « capitaine ».

« Elles étaient si dures qu’on les faisait tremper dans l’eau durant une journée avant de pouvoir y mordre. Aucun dentier naturel ou non n’aurait pas résisté à cette cuisson de roc, solide à ébrécher les haches et les godendards. »

L'article du Nouvelliste est tiré des Banques de données en histoire de la Mauricie. La photo des biscuits de mer provient d'un blog passionnant sur la ville de Honfleur dans le Calvados en Normandie, intitulé Honfleurissimo, malheureusement inactif. On peut constater, en visitant ce blog, la parenté culturelle évidente entre la Normandie et le Québec. Nos ancêtres normands, qui s'embarquaient à Honfleur, ont dû en manger des biscuits de matelot, à en perdre leurs dents, pendant leur longue traversée de l'Atlantique.


Parmi les personnages célèbres qui ont dégusté le biscuit du matelot, mentionnons la duchesse de Berry, captive dans la citadelle de Blaye en 1833. Faut dire qu'elle les faisait tremper dans le champagne.

Par ailleurs, au sujet de l'alimentation des bûcherons, vous trouverez sur le blog du Flâneur :
Sur la Normandie, voir aussi sur ce blog :
Sur les chantiers de bûcherons :

Le Lac McLaren

La Mauricie est un pays de lacs. On en trouve des dizaines au nord de la ville de Shawinigan. Aujourd'hui, ceux qui n'ont pas été intégrés au Parc national de la Mauricie sont entourés de résidences cossues, habitées à l'année.

Certains de ces lacs étaient autrefois accessibles aux familles ouvrières et quelques-uns le sont encore. Dans les années 1940-1960, les clubs sociaux des usines, les fabriques des paroisses et les communautés religieuses s'étaient constitué de petits domaines lacustres pour les loisirs de leurs membres.

Le Lac McLaren, situé à 18 mille au nord de Shawinigan, appartenait à la Ligue ouvrière catholique (LOC) de la paroisse du Christ-Roi de Shawinigan. Le nom vient peut-être de James McLaren qui avait des concessions forestières dans la région. Ce n'est qu'une hypothèse. Le lac était encore sauvage quand il été acquis par la LOC en 1946 et aménagé par des bénévoles de cet organisme. Au début, la route pour s'y rendre était un chemin de terre étroit et sinueux.

De petits chalets, numérotés de 1 à 12, étaient loués aux familles des membres de la LOC, pour une semaine ou deux. On y retrouvait donc à peu près les mêmes familles à chaque été.

Un des petits chalets rustiques du Lac McLaren

Ces chalets étaient très rustiques, mais quand même confortables, du moins aux yeux d'un enfant. Les mamans avaient peut-être une opinion différente. Elles faisaient la cuisine sur des poêles au naphta et on s'éclairait avec des lanternes qui brûlaient aussi du naphta. Les latrines, nommées bécosses, étaient situées à l'extérieur des chalets.

Comme il n'y avait pas d'électricité ni de gaz, il fallait acheter de gros blocs de glace pour conserver les aliments. Ces blocs, coupés dans la Rivière Shawinigan et conservés sous du bran de scie, étaient emballés dans du papier journal. C'était une glace très dense qui durait plusieurs jours, dans les anciennes glacières verticales, s'il ne faisait pas trop chaud. Le vendeur de glace extrayait lui-même les blocs durant l'hiver et les entreposait jusqu'à l'été pour les vendre aux vacanciers.

Un chalet, plus grand que les autres, était réservé à l'aumônier du lac, l'abbé Gaston Gélinas (1922-2004), un Père du Très-Saint-Sacrement, cousin du dramaturge Gratien Gélinas. Il était aussi l'aumônier de la troupe des scouts du Christ-Roi qui tenait des camps d'été au Lac McLaren. Le Père Gélinas disait sa messe dans une petite chapelle en bois construite près du barrage de la décharge du lac, qu'on appelait la dam.

Hubert Saintonge et le Père Gélinas sur la dam devant la chapelle

Le Lac McLaren était un paradis pour les enfants : se baigner, pêcher des menés à la serviette, se promener en chaloupe, chasser les mulots dans les chalets, chercher de l'eau de source à la grotte de la Vierge. Cette grotte, située sur le bord du lac et accessible par un sentier, était une imitation de celle que l'on voyait  au sanctuaire Notre-Dame du Cap.  La religion était partout à cette époque.  Je me souviens aussi qu'il y avait un lac de castors que l'on apercevait en chaloupe, en amont du Lac MacLaren. L'endroit était demeuré très naturel.

La grotte de la Vierge

À la Saint-Jean, des bénévoles construisaient un énorme feu de joie avec des conifères entiers. Il y avait aussi une épluchette de blé d'Inde annuelle, en plein air.

Plus tard, à la fin des années 1960, quand les structures paroissiales ont commencé à se désagréger, le lac a changé de vocation. Quand j'y suis allé pour la dernière fois avec les scouts à l'été 1968, c'était devenu un terrain de camping moderne, ouvert à tous, avec un snack bar. La route avait été élargie.

Je crois que l'endroit est encore géré par un organisme sans but lucratif qui a pris la relève de la LOC.

Voir aussi sur ce blog : Monastère et vie paroissiale