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mercredi 3 décembre 2014

Joseph Carufel mort pour la Nouvelle-France


Un court texte, inséré dans le registre de la paroisse de Saint-Antoine de la Rivière-du-Loup (Louiseville), fait état du décès de Joseph Carufel tué sur le champ de bataille le 28 avril 1760. Cette date correspond à la bataille de Sainte-Foy qui a été gagnée par les troupes du chevalier de Lévis, en route pour reprendre la ville de Québec aux Anglais.

"Le 28 avril 1760 a été tué sur le champ de bataille et enterré à ...  joseph Carufel âgé d'environ 28 ans."  signé P Audrau j



Ce n'est pas vraiment un acte de sépulture. Le jésuite Pierre Audrau, missionnaire à Maskinongé, ignorait où avait été enterré le corps de Joseph Carufel, peut-être dans une fosse commune après la bataille. Il a donc laissé un espace en blanc pour éventuellement ajouter le nom du lieu de sépulture s'il venait à le connaître.

La bataille de Sainte-Foy


Je crois que des troupes du régiment du Languedoc étaient stationnées près de Maskinongé en 1759-1760. En effet, plusieurs soldats de ce régiment ont été cités dans le registre de la Rivière-du-Loup, dans des actes relatifs à des habitants de Maskinongé : le capitaine Honoré-Louis de Cléricy (cité le 15 janvier et le 13 décembre 1759), le lieutenant Emmanuel de Cléricy (15 janvier 1759), le grenadier Olivier (28 janvier1760) et le capitaine des grenadiers D'Aiquebille (13 mars 1760). À l'époque, les soldats logeaient chez l'habitant.

Joseph De Carufel s'est-il engagé dans ce régiment ? Chose certaine, il faisait partie des 6000 hommes qui ont convergé vers Québec après la défaite des Plaines d'Abraham. Le chevalier François-Gaston de Lévis, qui avait pour mission de reprendre la capitale de la Nouvelle-France aux Anglais, commandait une armée composée de 2400 soldats réguliers, 2600 miliciens et 1000 alliés amérindiens.



La victoire de Sainte-Foy, que Joseph de Carufel a payée de sa vie le 28 avril 1760, allait permettre à l'armée de Lévis d'assiéger la ville de Québec. Mais le siège a dû être levé après deux semaines, à l'arrivée des renforts britanniques. Lorsqu'il aperçut la flotte anglaise remonter le fleuve Saint-Laurent, Lévis se serait écrié : La France nous a abandonnés ! Du moins, c'est ce qu'on nous a appris dans les manuels scolaires.

Les Sicard de Carufel


Le défunt Joseph Carufel (1732-1760), fils de Joseph Sicard de Caufel et d'Ursule Foucault, était marié à Louise Vanasse dite Vertefeuille, mais n'avait pas d'enfant. Un fils est mort en bas âge. Sa jeune veuve s'est remariée avec Jacques Dupuis onze mois plus tard, le 30 mars 1761. Elle a eu plusieurs enfants de ce second mariage.

Carufel appartenait à une famille de militaires issue de la petite noblesse française. Son grand-père, le seigneur Jean Sicard de Carufel (1664-1763), un ancêtre de ma conjointe, était un officier des troupes de la Marine, enseigne de la compagnie des Meloizes. Il a été capitaine de milice après sa retraite de l'armée. Je crois que tous les hommes de cette famille, fils et petits-fils du seigneur de Carufel, ont servi dans la milice canadienne, dont quelques-uns comme officiers.

Le grand-père Jean Sicard était originaire de Saint-Jacques de Castres dans le Haut-Languedoc, fils de Pierre Sicard De Carufel, avocat en parlement, et de Marie De Fargues. La seigneurie de Carufel que possédait sa famille se situait près de Fauch au nord de Castres.

En 1705, l'officier Jean Sicard s'est fait concéder une seigneurie en Nouvelle-France et lui a donné le nom de Carufel en souvenir de celle qui appartenait à sa famille en France. La nouvelle seigneurie de Carufel était située au nord de celle de Maskinongé et couvrait le territoire actuel de la paroisse de Saint-Justin.


mercredi 12 novembre 2014

Conçue par voie de fornication

Le prêtre récollet Bertin Mullet ne mâchait pas ses mots. En 1711, il était missionnaire à la Rivière Maskinongé, située à l'ouest de Trois-Rivières. Le 12 février de cette année, il a consigné l'acte suivant dans le registre de Trois-Rivières :



Qui était le père ? Le seul suspect possible est le fils de Pierre Blais et d'Anne Perrault, né en 1685 sur l'Île-d'Orléans.  Ce Jean Blais a passé un contrat de mariage avec Geneviève Martin le 25 octobre 1709 devant le notaire Chambalon de Berthier. Il était donc nouvellement marié au moment des faits. Je dois avouer que ce fornicateur compte parmi mes ancêtres, par son fils légitime Jean-Baptiste qui s'est marié à Trois-Rivières en 1742.

La mère, Marie Faye dite Sansquartier s'est mariée avec un autre homme, tout juste un mois avant la naissance de l'enfant. Elle a épousé François Banliac dit Lamontagne le 12 janvier 1711 à Trois-Rivières. La petite Marie a ensuite porté le nom de son beau-père Banliac. C'est sous le nom de Marie Banliac qu'elle a épousé Pierre Piet en 1739.

Il est rare que les actes de baptême des enfants illégitimes mentionnent le nom du père. La franchise du récollet Mullet allait avoir des conséquences juridiques. En 1749, l'héritage de Marie Banliac a été contesté devant les tribunaux, son beau-frère Michel Rabouin, époux de Geneviève Banliac, arguant que Marie n'y avait pas droit parce qu'elle était la fille naturelle de Jean Blais et non pas l'enfant de François Banliac. Il faisait valoir comme preuve l'acte de baptême rédigé en 1711 par le récollet Mullet. Je ne connais pas l'issue du procès.

Le document faisant état de cette contestation se trouve dans la biographie de Pierre Piet sur le site Nos Origines.

mercredi 25 juin 2014

Received into the Protestant Church

Ceux qui font des recherches sur les Loyalistes américains, réfugiés dans le Bas-Canada à compter de 1781, ont pu constater la difficulté de suivre les déplacements de ces familles d'une paroisse à l'autre et d'une confession chrétienne à l'autre.

J'ai retracé dans le registre de la Protestant Episcopal Congregation de Louiseville, dans le comté de Maskinongé, 30 cérémonies d'accueil de descendants de Loyalistes et d'autres anglophones qui avaient auparavant reçu un baptême catholique. Ces actes, datés du 21 décembre 1821 au 16 juillet 1823, portent tous la mention « received into the Protestant Church ».

Le révérend William, ministre de la Protestant Episcopal Congregation de Louiseville (appelons-la la PEC pour faire court), était un homme très consciencieux et son registre contient de succulents détails sur ses paroissiens.  J'ai déjà trouvé dans ce registre la sépulture de John Ross identifié par le révérend William comme vétéran de la bataille de Québec (voir Sépulture d'un vétéran de la bataille de Québec sur ce blog). Comble de précision, William nous donnait aussi son grade et le nom de son régiment. Seule lacune, les registres protestants ne mentionnent jamais le patronyme de la mère, identifiée seulement par son prénom. On trouve encore cet usage de nos jours dans les familles anglo-saxonnes.

Le registre protestant de Louiseville commence en 1821. Les baptêmes catholiques des personnes reçues dans la foi protestante ont eu lieu entre 1782 et 1823 à Saint-Joseph de Maskinongé ou à Saint-Antoine de la Rivière-du-Loup (Louiseville) pour la plupart. Parmi ces personnes, on compte 6 adultes et 24 enfants répartis dans 15 familles. J'ai ajouté entre parenthèses le patronyme de la mère qui n'est pas mentionné dans le registre. Voici donc les noms des parents des personnes « received into the Protestant Church » à Louiseville entre le 21 décembre 1821 et le 16 juillet 1823 : 
  1. Charles Armstrong et Mary (Marie Béland
  2. David Armstrong et Isabella (Dunn)
  3. Joseph Armstrong et Mary (Marie-Anne Brisset)
  4. Samuel Armstrong et Agatha (Agathe Brisset)
  5. Charles Dunn et Mary (Hebbard)
  6. Charles Dunn et Rebecca (Logie)
  7. William Dunn et Elizabeth (Armstrong)
  8. Robert Elliott et Elizabeth (Élisabeth Savoie)
  9. John England et Margaret (Turner)
  10. John Hebbard et Mary (Armstrong)
  11. Benjamin Page et Elizabeth (Hebbard)
  12. Robert Sinclair et Mary (Marie Rivard-Loranger)
  13. John Sullivan et Margaret (?)
  14. Dennis Sweeney et Mary (restés en Irlande)
  15. Robert Turner et Margaret (Dunn)

Un clan familial


Les patronymes des parents suggèrent des liens de parenté entre eux. Au moins 9 des 15 couples étaient apparentés aux Armstrong, aux Dunn, ou aux deux familles. Les « patriarches » de ce clan étaient les Loyalistes Charles Dunn, époux de Rebecca Loggie, et Jesse Armstrong, époux d'Alda Van Wormer et d'Hannah Crocker.

La fréquence inhabituelle de jumeaux parmi les personnes reçues est sans doute une conséquence de cette parenté. Parmi les 24 enfants, il y avait 3 couples de jumeaux, soit un taux de 25 %, alors que l'incidence des naissances gémellaires est normalement d'environ 2 %. Les parents de ces jumeaux étaient :
  • Robert Turner et Margaret (Dunn)
  • Joseph Armstrong et Mary (Brisset)
  • David Armstrong et Isabella (Dunn)
On trouve d'autres couples de jumeaux dans les familles Armstrong et Dunn.

D'une confession chrétienne à l'autre


L'analyse de ces actes (received into the Protestant Church) m'a permis d'en apprendre davantage sur leurs comportements en matière de pratique religieuse.

La PEC reconnaissait la validité du baptême catholique. Les actes recensés ne sont pas des baptêmes, mais plutôt des cérémonies d'accueil pour des gens qui ont déjà été baptisés. En comparaison, l'Église catholique était beaucoup plus rigide. Elle refusait de marier des couples baptisés dans des religions chrétiennes différentes et refusait aussi la sépulture aux chrétiens d'autres confessions.

Ces descendants de Loyalistes n'attachaient pas beaucoup d'importance à la dénomination de l'Église, pourvu qu'elle soit chrétienne. Ils pouvaient se marier à l'église anglicane de Trois-Rivières, faire baptiser leurs enfants à l'église catholique de Maskinongé et fréquenter ensuite l'église épiscopale de Louiseville. La proximité du lieu de culte et l'accueil qu'on leur faisait étaient semble-t-il plus importants que la confession. Après avoir fait baptiser leurs enfants dans la foi catholique, certains sont revenus à la foi protestante quand une église épiscopale s'est ouverte près de chez eux à Louiseville en 1821.

La consonance des prénoms


Certains des fidèles qui ont fréquenté la PEC étaient plus intégrés à la population canadienne-française qu'il n'y paraît.

Il faut se méfier de la consonance des prénoms. Des enfants ont reçu des prénoms français lors de leur baptême catholique, à Maskinongé ou ailleurs, et ensuite des prénoms anglais lors de leur entrée à la PEC. Quels étaient leurs véritables prénoms d'usage ?

Même remarque pour les conjointes. Marie Rivard-Loranger, Élisabeth Savoie, Marie Béland, Marie Brisset et Agatne Brisset étaient des Canadiennes-françaises dont les prénoms ont été anglicisés par le révérend William. Je crois que ces épouses francophones n'ont pas vraiment fréquenté la PEC, laissant y aller leurs maris protestants. Elles ont reçu une sépulture catholique.

William Hogg, un vétéran du 25th Foot Soldiers, qui a fréquenté la PEC à la fin de sa vie (1825) était connu dans son village de Saint-Léon-le-Grand sous l'identité de Guillaume Hogue. Lui aussi avait épousé une Canadienne-française, Marie-Louise Pépin, à l'église anglicane St.James de Trois-Rivières. 

dimanche 23 mars 2014

Sépulture d'un vétéran de la bataille de Québec

Selon l'officiant qui a rédigé son acte de sépulture, le 23 janvier 1822, John Ross de Maskinongé a participé à la bataille de Québec. Il faisait probablement référence à la bataille des Plaines d'Abraham qui s'est déroulée à Québec le 13 septembre 1759. Le cas échéant, Ross avait donc près de 90 ans au moment de son décès.

J'ai trouvé cet acte dans le registre de la Protestant Episcopal Congregation of Saint Antoine of the River du Loup (aujourd'hui Louiseville). Le défunt John Ross était un fermier né en Grande-Bretagne, habitant de la paroisse de Maskinongé depuis quarante ans, et autrefois sergent major du 78th régiment à la bataille de Québec.




Le 78th Fraser Highlanders, un régiment formé de soldats provenant des Highlands en Écosse, a participé à la prise de Louisbourg en 1758 et à celle de Québec en 1759. Ce régiment a été dissous en 1763 et plusieurs soldats sont demeurés dans la vallée du Saint-Laurent, se mêlant à la population locale. C'est d'ailleurs le seul régiment britannique à avoir été dissous en dehors de la Grande-Bretagne, parce que les Anglais craignaient que des Écossais entraînés au maniement des armes reviennent dans leur pays. Ils leur ont donc offert des terres dans leur nouvelle colonie du Canada, notamment à Maskinongé où quelques-uns d'entre eux se sont établis.

Reconstitution du 78th Hignlanders au Musée McCord à Montréal

John (William) Ross, qui se faisait parfois appeler Jean-Baptiste Ross, est l'ancêtre des Ross de la Mauricie. Il a épousé Marie-Louise Délpé-Sincerny le 7 juillet 1764 à Québec. Marie-Louise avait un huitième de sang algonquin par son arrière-grand-mère maternelle Marie Miteouamigoukoué, épouse de Pierre Couc. Ils ont eu au moins dix enfants à Maskinongé entre 1766 et 1795. Tous leurs enfants ont reçu des prénoms français et des baptêmes catholiques.

On trouve deux erreurs dans l'acte de sépulture présenté plus haut. Premièrement, John Ross était habitant de Maskinongé depuis près de 57 ans et non pas 40. Deuxièmement, selon les sources que j'ai consultées, il avait le grade de caporal dans le 78th Highlander et non celui de sergent major.

William Ross et James Ross qui ont marqué d'une croix l'acte de sépulture étaient les fils du défunt : Guillaume Ross né en 1768 et marié à Théotiste Dupuis, et Jacques Ross né vers 1774 et marié à Geneviève Grégoire.

mercredi 16 octobre 2013

Des Wolfe

Le célèbre général anglais James Wolfe, le vainqueur des Plaines d'Abraham en 1759, est mort sur le champ de bataille et n'a pas laissé de descendance au Québec, mais un mercenaire allemand portant le même patronyme a marié une fille de Trois-Rivières une vingtaine d'années plus tard.

Le monument Wolfe-Montcalm à Québec

Ludwig Augustus Wolfe ou Wolff était rattaché aux troupes de mercenaires allemands, au service de la Couronne britannique pendant la guerre d'indépendance américaine. Selon Dominique Richtot, il était commis-trésorier dans le régiment Riedesel. Ce régiment venait du Duché de Brunswick en Allemagne et ses membres étaient surnommés Brunswickers. Le patronyme de Ludwig Augustus est parfois écrit Wolf ou Wolff ce qui est, je crois, la forme allemande de Wolfe.

Après avoir quitté l'armée, il a gagné sa vie comme artiste-peintre. J'ai trouvé plusieurs mentions de son métier de peintre dans les registres. De plus, selon cette source, il aurait eu un atelier de peintre à Montréal, sous la raison sociale WOLF & BLANEY, dans les années 1790. Par ailleurs, dans son acte de sépulture en 1840, on le dit « intendant de l'institution royale », un titre dont j'ignore la signification.

Wolff a épousé Louise Bisson de Trois-Rivières vers 1781-82 dans un lieu inconnu. Louise, leur premier enfant, est née en 1783. Il est possible que leur union ait été célébrée par un aumônier militaire, ce qui expliquerait pourquoi l'on n'a pas retrouvé d'acte de mariage, ni de contrat d'ailleurs. Ludwig Augustus, devenu Louis-Auguste après son mariage, et Louise Bisson ont eu une douzaine d'enfants entre 1783 et 1805, j'en ai compté quatorze, dont au moins cinq ont fondé des familles :
  • Marie-Josèphe m François Canac-Marquis en 1808 à Sainte-Geneviève de Berthier
  • Jean-Louis m Julie Viau en 1809 à Sainte-Geneviève de Berthier
  • Julie m Joseph Proulx en 1815 à Nicolet
  • Charles-André m Josèphe Baron-Lupien en 1829 à Saint-Joseph de Maskinongé
  • Marie-Oliva m Prudent Fortier en 1830 à Berthier
En Mauricie, le couple Wolff-Bisson a des descendants dans le comté de Maskinongé. Un de leurs fils, Charles-André, époux de Marie-Josèphe Baron-Lupien, était instituteur à Saint-Joseph de Maskinongé. Ludwig Augustus Wolff est décédé dans cette paroisse le 16 mai 1840, à l'âge de 86 ans, et sa femme, Marie-Louise Bisson, a été inhumée au même endroit six ans plus tard.

On trouve aussi d'autres Wolfe, Wolf ou Wolff au Québec et en Acadie, notamment une famille Wolfe d'origine irlandaise dans la région de Québec.

mercredi 20 juillet 2011

Un tour de machine à la Caillette

Une carte postale qui date du début des années soixante. Elle montre une photographie de l'intérieur d'une véritable institution, le fameux restaurant Caillette qui était situé sur la vieille route 2 (aujourd'hui la 138) à Maskinongé. Il est écrit au verso de la carte : « L'endroit le plus original au Québec - Service chaud et froid ». Elle a été publiée par le Studio St-Cyr de Trois-Rivières.


C'était à l'époque l'une des destinations préférées des familles de la Mauricie lors des « tours de machine » ou ballades en auto du dimanche. On s'y arrêtait pour la crème glacée et autres milk shakes, mais surtout  pour le fromage frais « en crottes ». Le thème de la décoration était très clairement la vache, d'où le nom de Caillette : têtes de vaches qui dodelinaient sur les murs, plancher et comptoirs à motifs de peau de vache, cornes et queues de ruminants pendues au plafond.

Avec le recul, je dirais que c'était évidemment quétaine, mais surtout très amusant. Aussi, le modernisme impressionnait les enfants : l'air climatisé et les portes automatiques qui s'ouvraient toutes seules quand on les approchait étaient des nouveautés au début des années soixante. Sans parler des grosses vaches mécaniques grandeur nature qui se trémoussaient en beuglant.

Voici une seconde carte postale qui présente quatre photos de la Caillette. Le même slogan est écrit au verso : « L'endroit le plus original au Québec ». Cette carte a été publiée par la société UNIC de Montréal.


Ajout  du 15 août 2012 : Le restaurant est ouvert. Il conserve plusieurs éléments de l'ancienne décoration, mais ne porte plus le nom de Caillette.

samedi 9 juillet 2011

La mitaine de Maskinongé

Il y a une quinzaine d'années, j'avais rencontré dans le stationnement de l'église de Saint-Joseph de Maskinongé un homme qui construisait une maquette à l'échelle de l'ancienne église. Il moulait les pièces dans une matière plastique qu'il faisait cuire au four dans sa cuisine. J'ai malheureusement oublié son nom mais les habitants du lieu s'en souviennent sûrement.

Il m'avait parlé de la mitaine de Maskinongé. Autrefois, les gens appelaient mitaine les chapelles protestantes. Je crois que c'est une déformation du mot anglais meeting, terme qui désigne l'assemblée des fidèles chez les protestants. En pays catholique, c'étaient généralement des bâtiments en bois plutôt modestes, construits pour accueillir une petite communauté de fidèles. 

La mitaine de Maskinongé a été construite en 1891, à l'époque du conflit qui avait divisé les paroissiens à propos de l'emplacement de la nouvelle église paroissiale. Ceux de la rive Nord qui étaient en désaccord avec l'emplacement choisi par Monseigneur Laflêche avaient décidé de construire leur propre temple, sur le bord de la rivière Maskinongé, en croyant qu'il serait desservi par un prêtre catholique. Devant le refus du diocèse de consacrer la chapelle, une poignée de dissidents s'étaient convertis à la religion évangélique baptiste (voir Le schisme de Maskinongé sur ce blog).

Le croquis ci-haut représente la mitaine de Maskinongé, aussi appelée la chapelle maudite parce qu'un prêtre catholique en colère lui avait jeté une malédiction. Il est tiré de L'histoire de la paroisse Saint-Joseph de Maskinongé de Jacques Casaubon publiée en 1982. La chapelle a été démolie en 1930 après avoir été abandonnée vers 1920.


mardi 3 mai 2011

Que des conservateurs

À l'élection provinciale du premier mai 1878 dans Maskinongé, les trois candidats en lice étaient des conservateurs. Aucun candidat du Parti Libéral ne s'était présenté. Édouard Caron l'avait  emporté sur les deux autres conservateurs Alfred Baron-Lafrenière et Moïse Houde. Le parti était alors dirigé par l'avocat Joseph-Adolphe Chapleau, grand orateur et ami du curé Labelle.

Joseph-Adolphe Chapleau (1840-1898)

C'était la deuxième élection consécutive où le Parti Conservateur du Québec (PCQ), l'ancêtre de l'Union Nationale, n'avait pas d'adversaire libéral dans Maskinongé. Trois ans plus tôt, le 5 juillet 1875, Moïse Houde l'avait emporté sur un autre conservateur, Alexis Lesieur-Desaulniers.

Les résultats des élections générales provinciales depuis la Confédération sont disponibles sur le site QuébecPolitique.com

Voir aussi Une poursuite futile ? sur ce blog.

dimanche 1 mai 2011

Une poursuite futile ?

Un article paru dans Le Journal des Trois-Rivières du 20 septembre 1883 :

" Monsieur Fred Houde, député du comté de Maskinongé à la Chambre des communes, vient d’avoir gain de cause dans la poursuite que lui avait intentée Monsieur E. Ringuet, de cette ville, lequel accusait Monsieur Houde d’avoir offert mille piastres à Monsieur Isaïe Marchand de Maskinongé, lors des élections locales de 1881, pour induire ce dernier à retirer sa candidature. La cause a été plaidée devant Son Honneur le juge Bourgeois, qui a débouté l’action en condamnant le demandeur à payer tous les frais. Monsieur Nérée L. Duplessis était l’avocat de Monsieur Houde, et Messieurs Turcotte et Paquin étaient les avocats de Monsieur Ringuet. "
Voici quelques renseignements sur les personnages qui ont été impliqués dans ce procès :

Frédéric Houde (1847-1884)

Frédéric Houde (1847-1884) est né à Louiseville dans le comté de Maskinongé. Il a été journaliste et propriétaire de journaux au Québec et en Nouvelle-Angleterre. Fervent catholique et ultramontain, il a été élu député nationaliste-conservateur dans la circonscription fédérale de Maskinongé en 1878 et en 1882. L'étiquette nationaliste-conservateur a été utilisée entre 1878 et 1911 par certains députés conservateurs québécois qui voulaient se distancier de l'impérialisme britannique prôné par ce parti. Frédéric Houde est aussi l'auteur d'un roman : "Le Manoir Mystérieux ou Les Victimes de l'ambition" qui met en scène l'intendant Hocquart. Il est mort de la tuberculose à l'âge de 37 ans (voir le Dictionnaire biographique du Canada).

Nérée L-Duplessis (1855-1926)

Nérée LeNoblet Duplessis (1855-1926) est né à Yamachiche dans le comté de Saint-Maurice. Il était le père du premier ministre Maurice Duplessis. Avocat puis juge, il a été député conservateur de Saint-Maurice à l'Assemblée nationale de 1886 à 1900 et maire de Trois-Rivières en 1904-1905.

Isaïe Marchand (1826-1903) a été maire de Maskinongé. Il s'est présenté comme candidat indépendant à l'élection provinciale du 2 décembre 1881 et avait alors recueilli 28 % du vote, loin derrière le député conservateur Édouard Caron qui en était à son deuxième mandat (voir ici). Marchand a été le leader du schisme de Maskinongé en 1892 (voir Le schisme de Maskinongé sur ce blog).

Jean-Baptiste Bourgeois (1835-1902) né à Saint-Dominique en Montérégie, a été juge du district de Trois-Rivières de 1880 à 1900. Il est décédé à Trois-Rivières en 1902.

J'ignore qui était le nommé E. Ringuet qui a intenté la poursuite, probablement un adversaire politique de Frédéric Houde.

L'article du Journal des Trois-Rivières est tiré de "Bases de données en histoire de la Mauricie".

mardi 19 avril 2011

Le schisme de Maskinongé

Casaubon, Jacques, L'histoire de la paroisse Saint-Joseph de Maskinongé. Maskinongé, 1982, 548 pages.

Dans les paroisses naissantes, le choix de l'emplacement de l'église était un décision importante. Il y avait souvent des chicanes entre les habitants des différents rangs à ce sujet. L'enjeu était de taille, car c'était autour de l'église que se développait le village, ce qui augmentait la valeur des propriétés du rang choisi. Par exemple, à Saint-Boniface-de-Shawinigan en 1852, l'Évêque en personne avait dû intervenir pour trancher un différend entre les habitants des quatrième et sixième rangs. Quand il devait trancher, l'évêque allait planter une croix sur l'emplacement choisi  pour bien marquer sa décision et imposer son autorité aux paroissiens déçus.

En 1889, Maskinongé fondée en 1720 n'était plus une paroisse naissante, mais une nouvelle église, la quatrième, devait être construite plus près de la rivière où le village s'était développé après l'arrivée du chemin de fer. Jamais un chicane à propos de la construction d'une église n'est allée aussi loin. Déçues du choix de l'emplacement de la rive Sud-Ouest, une centaine de familles de la rive Nord-Est ont alors décidé de construire leur propre chapelle. Puis, comme l'évêque de Trois-Rivières leur refusait la visite d'un prêtre catholique, ils ont accueilli un ministre baptiste M. Burwash, envoyé par la mission de la Grande-Ligne dans le Richelieu, et se sont convertis à cette religion. Le pasteur baptiste William Stephen Bullock s'établit à Maskinongé en 1892 (voir Des loups dans la bergerie). Cette nouvelle paroisse protestante a ensuite servi de tremplin pour établir des missions à Sainte-Ursule et à Saint-Gabriel-de-Brandon en 1895.

Dans son Histoire de la paroisse, Jacques Casaubon nous présente une abondante correspondance échangée par les acteurs de ce drame paroissial. Je retiens deux éléments qui expliquent pourquoi ce conflit a dégénéré :
  • Le leadership des dissidents. Deux personnalités fortes étaient à la tête des habitants de la rive Nord-Est, le notaire Galipeau, président de la chambre des notaires, et M. Isaïe Marchand, qui pouvaient tenir tête au clergé local et même argumenter avec l'évêché.
  • Les maladresses du clergé. L'évêque de Trois-Rivières, Monseigneur Laflèche, avait d'abord tranché en faveur de la rive Nord-Est, et s'était même rendu y planter une croix, avant de se raviser après qu'une pétition ait été présentée par les habitants de la rive Sud-Ouest. Par la suite, un émissaire de l'évêque, le vicaire Hendricks, s'est permis de maudire la chapelle nouvellement construite, ce qui a provoqué la colère des dissidents. Enfin, le curé de la paroisse, qui a pris partie pour les habitants de la rive Sud-Ouest, était le neveu de l'évêque, ce qui a sans doute entaché la décision finale aux yeux des habitants de la rive Nord-Est.

dimanche 16 janvier 2011

Les aveux et dénombrements

L'occupation des terres dans la vallée du Saint-Laurent : Les aveux et dénombrements 1723-1745. Les éditions du Septentrion, Sillery, 1991.

L'intendant Bégon a ordonné en 1722 la confection d'un papier terrier des seigneuries de la vallée du Saint-Laurent. L'idée derrière cette entreprise était de vérifier si les seigneurs avaient bien mis en valeur leur seigneuries comme ils en avaient l'obligation. Les aveux et dénombrements qui ont été réalisés entre 1723 et 1745 décrivent chaque unité cadastrale de chaque seigneurie. Ils nous donnent quelques informations sur les terres des propriétaires : la superficie totale, la superficie en culture et les bâtiments.

La difficulté avec les aveux et dénombrements est de bien identifier le propriétaire dont on ne donne que le nom. Il faut connaître un peu l'histoire de la famille pour pouvoir l'identifier correctement.
       
Voici à titre d'exemple les informations que l'on trouve sur Claude Laspron dit Lacharité qui possédait une terre en censive dans la baie de Maskinongé (seigneurie de Maskinongé-Est) en date du 6 juillet 1734. On peut affirmer sans risque de se tromper qu'il était l'époux de Marguerite Foucault dont il a été question dans un message précédent (voir Une génération de trop chez les Lampron). En effet, il n'y avait que deux Claude Lampron chef de famille en 1734. Le deuxième, qui était le fils de Jean-Baptiste Lampron et de Madeleine Geoffroy, habitait dans le comté de Nicolet sur la rive Sud du Saint-Laurent. Il portait généralement le surnom de Desfossés.

Le 6 juillet 1734 donc, Claude Lampron dit Lacharité possédait une maison, une grange et une étable. Sa terre avait une superficie de 189 arpents dont 12 en labour. On retrouve dans le même secteur des Sicard de Carufel, Leclerc, Desserre,  Déziel-Labrèche,  Crevier-Bellerive,  Banliac-Lamontagne, Vanasse-Vertefeuille et Baron-Lupien.

Il est à noter que deux des enfants de Claude Lampron et Marguerite Foucault ont plus tard épousé des membres de la famille du seigneur du lieu Jean Sicard de Carufel :
  • Marie-Geneviève a épousé François Sicard le 11 janvier 1751 à Maskinongé.
  • Pierre a épousé Agathe Sicard le 21 février 1757 à Maskinongé.
Parmi les enfants du couple, c'est ce même Pierre, époux d'Agathe Sicard, qui a poursuivi la lignée des Lampron en Mauricie. Les trois autres fils de Claude Lampron et de Marguerite Foucault (Basile-Prisque, Augustin et François) se sont établis à l'extérieur de la région; le premier dans le comté de Nicolet et les deux autres sur l'île de Montréal.

Claude Lampron avait aussi d'autre enfants d'un premier mariage avec Charlotte Bruneau. Un des fils de ce couple, Jean-Baptiste époux de Françoise Déziel-Labrèche, à fait souche dans le comté de Maskinongé. Les autres se sont établis dans la comté de Nicolet.
  

vendredi 17 décembre 2010

Des avantages et un inconvénient du train

En 1879, l'achèvement de la construction du Chemin de fer du Nord entre Montréal  et Québec a facilité de façon considérable les déplacements entre les municipalités de la Mauricie situées le long de cette ligne. Des activités comme le tourisme, les pèlerinages et même les assemblées politiques ont alors connu un essor remarquable. À l'époque, il y avait souvent des fanfares à bord  pour distraire les passagers et peut-être aussi pour couvrir le bruit du train. On imagine le vacarme !

Voici quelques extraits d'articles de la presse régionale qui nous parlent avec enthousiasme de ces nouveaux développements. Certains déplorent cependant que l'arrivée du chemin de fer favorise l'exode des familles aux États-Unis.

Le tourisme 

« On nous dit que la baie de la Maskinongé va devenir une des places favorites pour le pique-nique des Trois-Rivières, grâce à la beauté de la plage et à l’abondance de la pêche et la facilité qu’il y a pour aller et revenir en chemin de fer. »  Courrier de Maskinongé (1 août 1878): 2, col. 4.

« Dimanche prochain, le 7 septembre, nous aurons de visite de Québécois : comme nos lecteurs ont pu le voir, sans doute, par les journaux de Québec. Une excursion, par le chemin de fer du Nord, partira de la gare du Palais à midi précis dimanche, arrivant ici vers 3:30 heures probablement. Les excursionnistes repartiront vers 7 heures du soir. Un magnifique corps de musique les accompagnera. »  La Concorde (5 septembre 1879): 3, col. 1.

Les pèlerinages

« Un grand pèlerinage à Ste-Anne de Yamachiche vient d’être organisé par les conférences St-Vincent-de-Paul de cette ville. Il aura lieu vendredi prochain. Les catholiques de cette ville profiteront, nous n’en doutons pas, de cette occasion, pour aller déposer leurs hommages aux pieds de la grande sainte dans le sanctuaire vénéré d’Yamachiche. Le voyage aura lieu par le chemin de fer du Nord; des arrangements ont été pris pour offrir aux pèlerins tout le confort et la facilité possible; les prix seront très réduits. Départ de la gare des Trois-Rivières à 5 1/2 heures du matin; retour à 10 heures a.m. et 7 heures du soir. »  Le Journal des Trois-Rivières (29 juillet 1878): 2, col. 4.

Les assemblées politiques

« Dimanche prochain, il y aura une grande démonstration politique à Yamachiche à laquelle les honorables Messieurs Joly, Marchand, Turcotte et Messieurs Charles Langelier, J. N. Bureau, C. R. et plusieurs autres orateurs distingués adresseront la parole. À cet effet, et pour donner à nos amis l’avantage de prendre part à cette grande démonstration, un train spécial du chemin de fer du Nord laissera la gare des Trois-Rivières à l’heure précise, dimanche, pour se rendre à Yamachiche, où doit avoir lieu la démonstration, et de là à Rivière-du-Loup, afin de donner l’avantage aux amis de la cause libérale, en cette paroisse, de se joindre à nous. Le train arrêtera aussi, en allant et revenant, à la Pointe-du-Lac. Un magnifique corps de musique fera partie de l’excursion. Le prix du passage, aller et retour, sera réduit à 25 centins, afin de permettre à chacun de prendre part à cette grande manifestation libérale. »  La Concorde (3 octobre 1879): 2, col. 1.

L'émigration aux États-Unis

« Nous regrettons de constater qu’à chaque convoi de chemin de fer du Nord Q.M.O. et O., quatre à cinq familles prennent passage pour les Etats-Unis. »  Courrier de Maskinongé (15 avril 1880): 2, col. 2. 

« On nous informe que les agents pour la vente des billets pour les différentes compagnies de chemin de fer font de véritables ravages dans notre district. Il y a de ces agents dans presque toutes les paroisses et la plupart, pour grossir leur commission, encourage les cultivateurs à émigrer aux Etats-Unis. Nous attirons l’attention du gouvernement sur ce regrettable état de choses. »  La Concorde (25 août 1880): 3, col. 1.


Ces extraits sont tirés des Bases de données en histoire de la Mauricie.

Voir aussi sur ce blog :  En attendant le train, La Bonne Sainte-Anne et 400 victimes sur un vapeur.