lundi 17 décembre 2012

Vivre pour survivre

Paul-Henri Lavoie agronome, Vivre pour survivre, L'Imprimerie Générale de Rimouski Limitée, Rimouski, 1946, 92 pages.

On croirait que c'est une erreur, un anachronisme. Mais non, cette brochure a vraiment été publiée en 1946. Elle préconise l'ouverture de nouvelles terres à la colonisation et nous apprend comment survivre, dans des conditions misérables, grâce à une agriculture de subsistance.

Paul-Henri Lavoie était agronome au Ministère de la colonisation du Québec. Pour l'essentiel, son manuel du parfait colon aurait pu être écrit au XIXe siècle. Fondé en 1888, le ministère de la Colonisation a survécu à la Révolution tranquille et n'a été aboli qu'en 1973. Son action était soutenue par les autorités religieuses.

On peut lire dans la préface :
« Le colon qui peine sur son lot, même qui mange de la misère, peu porter haut le front, s'enorgueillir de son rôle admirable et digne entre tous ! Il a le droit d'envisager fièrement l'avenir. Les générations futures n'auront certainement pas à rougir de lui ! Car quels que soient les tracas, les peines, les épreuves, les difficultés, les misères du moment présent, rien n'est plus héroïque, rien n'est plus glorieux que VIVRE POUR SURVIVRE. »
Le ministère de la Colonisation s'est illustré dans les années 1935, au sortir de la Grande Dépression, en envoyant des familles défricher des terres peu propices à l'agriculture en Abitibi et en Gaspésie. C'était le Plan Vautrin, du nom du ministre de la Colonisation de l'époque. Mes grands-parents maternels s'étaient établis à Landrienne en Abitibi. La plupart des paroisses qui ont été crées par ces colons du XXe siècle sont fermées aujourd'hui.

Vivre pour survivre contient des informations intéressantes sur l'histoire de la colonisation au Québec. On y apprend notamment que, de 1898 à 1944, neuf congrès de colonisation ont eu lieu dans différentes régions du Québec. Le denier a eu lieu à Montréal les 10 et 11 avril 1944. À cette occasion, le père jésuite Archambault, président des Semaines sociales du Canada, a prononcé un discours qui explique pourquoi l'Église catholique attachait une telle importance à la colonisation :
« Notre groupe ethnique ne résistera aux forces liguées contre lui que par sa propre vitalité, continue le R. P. Archambault. Il puisera sa vigueur en premier lieu dans une forte natalité. Or, notre accroissement numérique est lié à la terre, car la ville ne favorise pas le capital humain. Elle est une mangeuse d’hommes, destructrice à la fois des corps et des âmes. Pour que la famille puisse grandir et prospérer, il lui faut la saine atmosphère de la campagne, la nourriture substantielle et frugale de la ferme, le repos loin du bruit, des odeurs empoisonnantes et des amusements délétères des grands centres.

Les campagnes sont le réservoir, la pépinière de notre nationalité. Mais à mesure que les familles croissent, l’espace alentour d’elles diminue et il faut de toute nécessité s’éloigner du sol natal et aller s’établir ailleurs. La terre ne manque pas chez nous et un magnifique domaine encore inexploité n’attend que le travail des hommes pour se transformer en paroisses prospères et augmenter ainsi notre nombre et notre influence. Susciter ce travail, le faciliter, le soutenir, telle est l’œuvre de la colonisation. »

Voir aussi sur ce blog : Notre mère la terre.

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