vendredi 28 décembre 2012

Quand on est de la haute-ville ...

Claude Bellavance et François Guérard, Ségrégation résidentielle et morphologie urbaine, le cas de Shawinigan, 1925-1947. Revue d'histoire de l'Amérique française, volume 45, no 4, printemps 1993.


Sylvain Lelièvre chantait, à propos de la ville de Québec : « Quand on est d'la basse-ville, on n'est pas d'la haute-ville.  Y en a qui s'en souviennent, d'autres qui aiment peut-être mieux pas ».

À Shawinigan, c'était exactement le contraire, la basse-ville était plus riche que la haute-ville. Cet écart de richesse se reflétait notamment sur le statut professionnel des résidents et sur la qualité du bâti. La topographie des lieux a favorisé ce clivage. Les deux grands secteurs de la ville, séparés par la voie ferrée, n'étaient reliés que par le viaduc de la côte Saint-Marc.

J'utilise le passé parce que cette étude sur la ségrégation résidentielle porte sur une période relativement ancienne, soit les années 1925 et 1947. Mais je crois que les conclusions demeurent valables pour les décennies cinquante, soixante et même soixante-dix.

La langue était l'un des facteurs de ségrégation les plus importants à l'époque. Les patrons des usines étaient tous anglophones. Ils avaient de meilleurs revenus, habitaient  des quartiers distincts et géraient leurs propres institutions (High school, Hôpital Joyce, églises, etc). Les petits boss, les contremaîtres francophones, inscrivaient leurs enfants à l'école anglaise pour leur faire grimper l'échelle sociale. C'était avant les lois linguistiques 63, 22 et 101.

Un îlot de richesse se distinguait dans la haute-ville. La Shawinigan Water and Power avait construit pour ses employés des maisons de ville cossues sur la rue George, juste en haut de la côte Saint-Marc. Le contraste avec les habitations ouvrières de la paroisse Saint-Marc était frappant.

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