mercredi 12 décembre 2012

Étincelles

Moïsette Olier (Corrine Beauchemin), Étincelles, Le Nouvelliste, Trois-Rivières, 1936, 221 pages.

Étincelles est une version remaniée du roman Cendres qui est paru en feuilleton dans le journal Le Bien public de Trois-Rivières.

Jules Thibaud de Saint-Étienne-des-Grès se présente aux Forges du Saint-Maurice pour chercher du travail. Le maître de forges Maxwell l'embauche malgré ses quatorze ans, parce qu'il est intelligent et déjà fort comme un homme. Il loge chez le père Morin qui lui raconte l'histoire des forges et des légendes sur l'apparition du Diable. La nuit, sa chambre est envahie par la clarté violente du haut-fourneau. 


Parmi les histoires que raconte le père Morin, il y a celle de la fontaine du diable, un source de gaz naturel située sur la berge du Saint-Maurice. Il dit à Thibaud : « Ça a l'air de rien à regarder comme ça. On pense que c'est juste an p'tit trou d'eau sans malice ... eh ben ! va mettre du feu su ça, et tu m'en donneras des nouvelles. » J'y ai mis le feu à l'été 1973. La flamme qui en sortait avait quelques pouces de haut. J'imagine qu'à l'époque du père Morin la réserve de gaz et la hauteur de la flamme étaient beaucoup plus importantes. Il ne restait plus rien quand j'y suis retourné vers 1998.

Revenons au récit. Thibaud se lie d'amitié avec le fils de Maxwell, ce qui lui donne accès à la bibliothèque de la Grande Maison. Le soir, il lit des ouvrages sur la sidérurgie pour devenir un expert métallurgiste. Il n'a pas de temps à consacrer aux filles qui tournent autour de lui. Au bout de quelques années, à force de travail, le jeune ambitieux devient contremaître des forges, le bras-droit du maître Maxwell. 

Un beau jour, arrive un homme veuf qui cherche du travail, accompagné d'une charmante enfant de dix ans prénommée Reine-Marie, la petite Reine. Thibaud embauche le papa à la forge et l'installe avec sa fille dans la maison jaune. Les années passent et on devine le dénouement romanesque. Mais la morale chrétienne est toujours respectée.

Étincelles se lit comme un roman jeunesse, presque comme un conte de fée. Pour Moïsette Olier, c'était un retour vers une enfance idéalisée. La dédicace du livre est d'ailleurs révélatrice à cet égard :
« A la mémoire de mon père, le Docteur Louis-Jean-Baptiste Beauchemin, et de sa compagne, ma mère aimée. A vous aussi mes frères et mes soeurs, parce que les Vieilles Forges c'est notre enfance ; ses souvenirs, notre jeunesse ... la plus attachante page de notre vie. »
Le roman se nourrit donc des souvenirs d'enfance de l'auteure, mais aussi d'une recherche sérieuse sur l'histoire du lieu et sur le fonctionnement d'une forge. Ces détails du récit m'ont semblé véridiques. Une scène en particulier mérite d'être signalée : un pique-nique des ouvriers de la forge avec leurs familles sur le bord du Saint-Maurice. La simplicité de ces festivités populaires est mise en contraste avec le faste des réceptions qui sont données à la Grande Maison.

Le livre est illustré de cinq linogravures en noir et blanc réalisées par Henri Beaulac (1914-1994). Elles représentent les personnages principaux : Jules Thibaud, le père Morin et l'orpheline Reine-Marie (un portrait enfant et un autre adulte), de même qu'une vue des Forges du Saint-Maurice. Henri Beaulac, fils du docteur Henri Beaulac et de Bella Duval de Trois-Rivières, était un ancien élève d'Albert Tessier au Séminaire Saint-Joseph et un collaborateur de ce dernier aux Éditions du Bien Public. Comme graveur, il est surtout connu pour ses illustrations de légendes canadiennes comme la Chasse-galerie et Rose Latulippe (Collection du Musée des Beaux-Arts du Canada). Il fut aussi professeur à l'École du meuble de Montréal et un décorateur ensemblier réputé.


Étincelles n'a pas connu une grande diffusion. Il a été imprimé à seulement 1500 exemplaires. Mais sa publication en feuilleton dans le journal Le Bien Public a permis de rejoindre un lectorat plus important.

L'exemplaire que j'ai acheté usagé a été joliment relié par son ancien propriétaire. La première page porte la signature de Charles-E. Bourgeois pre. Il s'agit, je crois, de l'abbé Charles-Édouard Bourgeois (1898-1990) qui a fondé plusieurs organismes sociaux dans le diocèse de Trois-Rivières.

Voir aussi sur ce blog : Moïsette Olier et Moïse sauvé des eaux.
Et sur Laurentiana : L'homme à la physionomie macabre.

1 commentaire:

Jean-Louis Lessard a dit…

Je n'ai jamais vu ce livre! J'ai Sha&inigane que je devrais présenter bientôt. J'ai fait un lien de L'Homme macabre à Étincelles.