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| Louisa Paulin (1888-1944) | 
Louisa Paulin, née à Réalmont dans le sud de la France, écrivait en français et en occitan. Elle était atteinte d'une maladie rare, la neuropathie amyloïde,  qui l'a rendue aveugle et paralysée. Incapable d'écrire, elle dictait ses poèmes et sa correspondance à des amis qui venaient la voir. Le dernier poème qu'elle a dicté avant de mourir s'intitulait Quelqu'un. Elle entrevoyait sa propre mort avec beaucoup de lucidité, comme une délivrance.
Quelqu'un
Quelqu'un d'un doigt léger m'a touchée à l'épaule. 
Je me suis retournée mais il s'était enfui : 
Peut-être es-tu celui que je n'espérais plus 
Et dont le souvenir confus 
Trouble encore quelquefois le miroir de mes songes ? 
Ou bien 
L'ange gardien de mon âme d'enfant 
Alors que résonnait aux jardins du Printemps 
Le doux éclat de nos deux rires ? 
Je froissais quelquefois tes ailes dans nos jeux, 
Blanches ailes au reflet bleu 
Comme l'enfantine journée. 
Viens-tu comme autrefois, poser mes pieds lassés 
Sur la divine échelle où palpitaient les anges ? 
Nous la sentions vibrer d'amour pur sous nos doigts, 
Mais c'était le temps d'autrefois... 
Ou bien 
Es-tu tout simplement 
Celle que chaque jour j'attends, 
La patiente Silencieuse, 
Avec le fil aiguisé de ta faux 
Dissimulé derrière ton épaule ? ... 
Es-ce donc en ce soir d'automne 
Et dans sa fragile beauté 
Qu'il faut partir pour l'incertain voyage ? 
Ô Mère du sommeil, prends moi donc par la main, 
Ne faisons pas de bruit et ne troublons personne, 
Partons comme s'envole une feuille en automne. 
 
 



