À Saint-Boniface-de-Shawinigan, dans le haut du quatrième rang, une érablière qui était autrefois exploitée par la famille Lampron pour la production de sirop d'érable est maintenant peuplée de hêtres à grandes feuilles (Fagus grandifolia), un bel arbre à l'écorce grise et lisse dont le tronc ressemble à la patte d'un éléphant. Le changement est apparent en automne quand la couleur brun cuivré des feuilles du hêtre domine le rouge vif de l'érable à sucre.
Selon une recherche qui a été effectuée par le ministère des Ressources naturelles et de la Faune (ici), l'envahissement des érablières par le hêtre serait une conséquence des pluies acides qui rendent le sol forestier moins fertile, ce qui entraîne le dépérissement des érables à sucre (Acer saccharum). Le hêtre à grandes feuilles, beaucoup moins exigeant en matière de sol, prend possession de l'espace qui est ainsi libéré. D'après Louis Duchesne, ingénieur forestier et chercheur au Ministère (ici), on compte présentement deux
pousses d'érable pour une pousse de hêtre dans certaines régions du Québec. Ce ratio était de sept pour un dans les
années 1960.
Il s'agit donc d'un phénomène relativement récent. Dans la Flore laurentienne publiée en 1930, le botaniste Marie-Victorin n'en fait pas mention. Il explique au contraire comment l'érable à sucre réussit à former des forêts pures :
"L'érable à sucre est l'arbre magnifique qui forme en tant d'endroits du pays laurentien les forêts pures (érablières) qui sont un de ses charmes. Il affectionne les terrains élevés mais frais et riches ; il occupe souvent les moraines bien drainées sur les rebords du Bouclier laurentien, mais il atteint chez nous son plus grand développement au sud de la province, sur les premiers contreforts des Appalaches, dans la belle région dite des Bois-Francs. Les jeunes pousses de l'érable à sucre tolérant parfaitement l'ombre des progéniteurs, il s'ensuit que les érablières sont des formations permanentes qui se régénèrent indéfiniment en supprimant automatiquement les autres espèces de haute futaie..."
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