mardi 29 janvier 2013

Les commandements du généalogiste

J'aurais bien aimé en avoir dix comme Moïse, mais n'en ai trouvé que huit. Voici donc mes huit commandements du généalogiste amateur.

1. Prendre le temps

Dresser un tableau d'ascendance prend du temps, plusieurs années.  Il faut que cette recherche devienne un loisir agréable, et non pas une corvée dont on veut se débarrasser. La précipitation augmente de beaucoup les risques d'erreurs.
  
2. Ne rien écrire sans preuve

Ce conseil m'a été donné autrefois par un couple de généalogistes à l'ancienne, Euclide Descôteaux et Madeleine Pichette. Ils ont complété leurs tableaux d'ascendance à l'époque héroïque où l'on recueillait les informations dans les presbytères. 

Aujourd'hui, malgré le progrès technologique, la démarche demeure la même. On ne doit jamais inscrire une simple hypothèse dans un tableau d'ascendance, en se disant qu'on la vérifiera bien plus tard. Comme des moules sur un rocher, les erreurs ont tendance à s'incruster.

3. Construire des preuves de filiation

Quand un acte de mariage est introuvable, ou que les parents des conjoints ne sont pas mentionnés dans l'acte, il faut prendre le temps d'établir des preuves de filiation pour chacun des conjoints.  Le généalogiste René Jetté explique bien la façon de procéder dans son Traité de généalogie publié en 1991. 

C'est, pour moi, la partie la plus intéressante de la recherche généalogique que je compare à une enquête policière. J'y reviendrai.

4. Rechercher aussi les naissances

Ce n'est pas obligatoire, mais tellement plus sûr qu'une simple recherche par les mariages. Peu de chercheurs le font systématiquement. 

5. Toujours noter les sources

Un jour, j'ai trouvé dans une banque de données sur l'internet une information que je cherchais depuis longtemps. Il s'agissait d'un individu qui était mystérieusement disparu (voir Josaphat Bourassa a disparu sur ce blog). J'ai demandé à l'auteur de la banque de données quelle était la source de cette information. Il m'a répondu textuellement : « J'ai 400 000 individus dans ma banque de données, si vous croyez que j'ai le temps de noter mes sources ! »   

Je n'ai jamais compris pourquoi des gens comme lui, que je ne nommerai pas, perdent leur temps à monter d'énormes banques de données auxquelles, par manque de rigueur, ont ne peut accorder aucune fiabilité. L'esprit de compétition ? Comme le dit si bien le proverbe : « garbage in, garbage out. »

6. Vérifier les information de tiers

C'est facile à faire lorsque les sources sont mentionnées, et encore plus important quand elles ne le sont pas.

7. Se méfier de l'homonymie

Il n'est pas rare que deux couples portent les mêmes noms et prénoms à une même époque et dans une même région. C'est une des raisons pour lesquelles il est préférable de chercher aussi les naissances en plus des mariages (voir Un cas d' homonymie à Yamachiche sur ce blog).

8. Consulter les registres

Plusieurs informations que les officiants ont notés dans les registres ne se retrouvent pas dans les répertoires de baptêmes, mariages et sépultures qui ont été compilés par les sociétés de généalogie ou dans les banques de données qui ont été construites à partir de ces répertoires, comme BMS2000. Il y a dans les registres des détails qui peuvent vous orienter dans vos recherches : métiers et professions, lieu de résidence, lien de parenté, témoins, parrain et marraine, origine ethnique, religion, cause du décès (rare), lieu du décès, etc. On peut consulter des images des registres sur microfilms dans les centres de documentation de BANQ ou des sociétés de généalogie, ou encore sur des sites internet payants comme celui d' Ancestry.ca.

9. Mettre de la chair autour de l'os.

Un tableau de noms avec des dates de mariage n'est pas bien intéressant. Il faut chercher plus loin pour découvrir l'histoire de nos ancêtres, dans les contrats notariés, les jugements de cour et les articles de journaux, par exemple. Il faut aussi inventorié les photos de famille et bien les identifier avant qu'il ne soit trop tard.

10. S'intéresser à tous les ascendants

La transmission du patronyme de père en fils n'est qu'une simple convention. L'ancêtre du nom n'a pas plus d'influence sur notre bagage génétique, n'est pas plus parent avec nous, que n'importe lequel  des 4096 ascendants, à la douzième génération. L'ancêtre du nom peut même avoir moins d'importance qu'un autre individu qui revient plusieurs fois dans le tableau d'ascendance. Pensons à Étienne Gélinas en Mauricie ou Pierre Tremblay dans Charlevoix.
 

Voir aussi sur le Carnet du Flâneur : La généalogie pour les snobs

samedi 26 janvier 2013

Les pionniers de la haute-ville

Dans Shawinigan depuis 75 ans, à la page 186, Fabien Larochelle mentionne que « trois familles pionnières (Lavergne, Lambert et St-Onge) ont participé au premier développement de la haute-ville de Shawinigan. » C'est tout ce qu'il raconte à ce sujet.

Fabien Larochelle faisait référence à trois cultivateurs du rang Des Hêtres de Sainte-Flore, un rang qui traversait le territoire qui allait devenir plus tard la haute-ville de Shawinigan : Adélard Lavergne (1869-1944), Augustin Lambert (1838-1920) et Antoine Martineau dit Saintonge (1835-1889). Pour simplifier un peu, j'ajouterai que les terres de Saintonge étaient situées dans la paroisse Saint-Marc, celles de Lambert dans Saint-Marc et Sainte-Croix et celles de Lavergne dans Christ-Roi et l'Assomption. Ces quatre paroisses religieuses n'existent plus aujourd'hui, regroupée sous l'appellation de paroisse Marguerite d'Youville.

Antoine Martineau-Saintonge et Augustin Lambert, des beaux-frères, étaient originaires du rang Quatre de Saint-Boniface. Ils ont reçu gratuitement des terres dans le rang Des Hêtres de Sainte-Flore en vertu de la Loi des douze enfants. Adélard Lavergne était originaire de Sainte-Flore. Son père Louis exploitait une ferme dans un autre rang de cette paroisse.

Le hameau qui s'est formé en haut de la côte Saint-Marc au début du vingtième siècle était appelé « village St-Onge » ou plus simplement « St-Onge », tandis que le bas de la ville était nommé familièrement « la Pointe », à cause de sa forme de péninsule qui s'avance dans la rivière Saint-Maurice. L'appellation « St-Onge » n'a pas duré bien longtemps, peut-être un vingtaine d'années tout au plus, mais on dit encore de nos jours « descendre à la Pointe ».

Le terme de pionniers que j'ai employé dans le titre de cet article est peut-être exagéré. Les trois familles se sont établies dans un milieu agricole déjà structuré, le rang Des Hêtres de Sainte-Flore. Ce n'étaient pas des colons, au sens où on l'entend généralement. Ces familles ont tiré profit de la vente des terrains pour le développement rapide de la haute-ville. Ainsi, Émile Lavergne, un des fils d'Adélard, se vantait d'avoir ouvert seize rues (Fabien Larochelle, op. cit. p 187).

Voir aussi sur ce blog : La loi des douze enfants, de même que La maison Adélard Lavergne.

dimanche 20 janvier 2013

Émery abat un ourson

En 1951, il était bien vu d'abattre les ours qui s'approchaient des lieux habités. On pouvait tuer un ourson et s'en vanter dans le journal local. Le 12 septembre de cette année-là, le journal Les Chutes de Shawinigan rapportait qu'Émery Lavergne avait abattu un ourson, disons plutôt un jeune ours puisque la bête de 18 mois pesait quand même 150 livres. Trois semaines plus tard, le même journal rapportait qu'Elphège Boisvert, le beau-frère d'Émery Lavergne, avait tué une femelle de deux ans pesant 200 livres.

Il était inhabituel que ce journal rapporte des histoires de chasse. J'en déduis que la présence des ours était préoccupante à l'automne 1951. Ce qui m'a particulièrement intéressé dans ces articles, c'est la profusion de détails, j'adore les détails. Remarquez le prétexte pour abattre les ours : « Chaque année, des moutons disparaissent. Actuellement, on monte bonne garde. Il n'y a eu que très peu de pertes et on entend qu'il n'y en ait pas davantage. » Comme dit le proverbe : qui veut noyer son chien l'accuse de la rage.

Émery Lavergne, Léo Lavergne et Elphège Boisvert étaient mes grands-oncles. Voici donc les deux articles du journal Les chutes de Shawinigan.


- Un jeune ourson abattu à St-Gérard des Laurentides. Les résidents de la municipalité de St-Gérard des Laurentides rapportent la présence de plusieurs ours qui parcourraient les bois environnants à ce temps-ci de l'année. M. Émery Lavergne de Shawinigan en a abattu un, qui peut avoir 18 mois, et d'un poids de 150 lb, dimanche soir, au bout de la terre de M. Willie Thiffault, et à proximité du chalet de son frère le Dr Léo Lavergne. Depuis trois semaines, on constatait que des ours, et plus particulièrement celui qui a été tué dimanche, mangeaient dans les champs d'avoine et causaient de sérieux dégâts. MM. Émery Lavergne, Léo Lavergne et Léo Lafrenière le guettèrent, dimanche soir, et mirent bien en vue des déchets de viande, à environ 200 pieds du bois. L'ours se dirigeait directement vers cet appât, et il était à 150 pieds du bois déjà, quand il fut abattu d'une balle de la carabine 30-30 Winchester, maniée par M. Émery Lavergne. (Les Chutes de Shawinigan, 12 septembre 1951, page 10).

- Un ours de 200 livres abattu à St-Gérard - Depuis le milieu de l'été dernier, on a signalé à quelques reprises la présence d'ours dans les bois avoisinants de St-Gérard des Laurentides et de St-Mathieu à quelques milles de Shawinigan. Comme ces bêtes sauvages sont une menace à la vie des personnes et causent des dommages matériels en dévorant des moutons, les cultivateurs leur donnent la chasse du mieux possible. On se souvient qu'il y a un mois et demi environ, un ours avait été abattu au fusil par un cultivateur de St-Gérard. La semaine dernière, un autre ours, une femelle cette fois, de quelque 200 lb a été tiré par M. Elphège Boisvert de Shawinigan et M. Willie Thiffault de St-Gérad. Elle mangeait dans un champ de trèfle, sur la terre de M. Thiffault, à un demi-mille du village. Tous les deux armés, MM. Boisvert et Thiffault ont tiré d'une distance de deux arpents. Les deux coups ont porté à l'épaule. Il s'agissait d'un animal de deux ans, pesant plus de 200 lb. De l'avis de M. Boisvert, les ours deviendront plus menaçants, pour les moutons aux pâturages. Chaque année, des moutons disparaissent. Actuellement, on monte bonne garde. Il n'y a eu que très peu de pertes et on entend quil n'y en ait pas davantage. (Les Chutes de Shawinigan, 3 octobre 1951, page 6).

mardi 8 janvier 2013

Le dernier des hommes

Le 5 février 1857,  L'Écho du Saint-Maurice de Trois-Rivières a publié un article humoristique à propos  de la mode féminine de l'époque qui mettait en valeur des robes bouffantes soutenues par d'énormes crinolines. 

Caricature de Georges Cruikshank parue en 1850.

Le journal s'excusait d'avance auprès des belles lectrices, une façon sans doute de piquer leur curiosité. Voici donc le texte :

« Belles lectrices trifluviennes permettez-vous à L'Écho du Saint-Maurice de vous raconter un rêve qui mérite sûrement considération de votre part. Vous lui permettez, n'est-ce pas ? Oui, je vous entends toutes dire en choeur. Si donc ce récit blesse vos inclinations, ne vous choquez pas contre une feuille à qui vous avez donné une permission bénévole dont elle profite. C'est une tête américaine qui a engendré ce rêve, nous allons lui laisser raconter. Attention, belles lectrices.

Hier, dans le calme et le silence de la nuit, j'eus un rêve, un rêve terrible, qui me fit dresser les cheveux sur la tête comme les piquants d'un hérisson. Il me sembla que les jupons prenaient de gigantesques proportions et que sous la voute des cieux ils ne laissaient plus de place pour l'homme. Les bêtes et toutes les créatures rampantes étaient mortes. Plus de fleurs, les plantes et les herbes du printemps s'étaient flétries. Les crinolines enveloppaient la terre dans un linceul de dix-millions de lieux ; et sur la scène froide et désolée n'arrivait plus un seul rayon de soleil. Sur le sommet voilé du mont Ararat, le dernier homme s'était réfugié ; il se tenait là pâle, effaré, triste reste d'une race éteinte. En vain hélas ! en vain son pied cherchait-il l'antique appui de la terre maternelle, les jupons couvraient toutes les plaines et leurs nuages dérobaient les montagnes de leurs plis. Les blanches sphères grandirent encore, montant vers le haut sommet, dérobant et couvrant l'infortuné comme des drapeaux de neige. L'homme alors sonda le précipice du regard ; il jeta un dernier cri de désespoir, "Place aux crinolines" s'écria-t-il, et il plongea dans l'abime. »

La caricature provient d'English Wikipedia. Elle a été publiée originellement dans le Comic Almanach de 1850.

lundi 7 janvier 2013

Indulgences et porte d'église

Au 16e siècle, l'Église catholique a trouvé un moyen original pour se financer. Elle vendait des indulgences. Les fidèles qui en avait les moyens pouvaient ainsi racheter leurs péchés, sans avoir à se confesser. Ils pouvaient même racheter les péchés de leurs proches défunts. On a attribué la phrase suivante au dominicain allemand Jean Tetzel, grand vendeur d'indulgences :  À peine l'argent a-t-il sonné dans ma caisse, que l' âme s'élance hors du purgatoire et prend son vol vers le ciel. » C'était l'un des excès qui ont conduit le réformateur Martin Luther a quitter l'Église catholique pour fonder le protestantisme.


Heureusement, cette pratique a disparu, mais d'autres moins graves ont subsisté. Ainsi, le journal Le Trifluvien du premier octobre 1897 nous apprend que l'on peut accumuler des indulgences en entrant et sortant plusieurs fois par la porte d'une église, en l'occurrence celle du  sanctuaire du Cap :

« Dimanche prochain, fête de N. D. du Rosaire, une indulgence plénière appelée le Grand Pardon du Rosaire pourra être gagnée à chaque visite faite à l’autel du Rosaire dans l’antique sanctuaire du Cap-de-la-Madeleine. Pour profiter de cette grâce insigne, il faut être contrit, confessé et communié. Il faut aussi, chaque fois, une entrée nouvelle dans l’église. Les visites doivent être réellement distinctes, mais il suffit de sortir de l’église, ne serait-ce qu’un instant. Le Grand Pardon du Rosaire peut se gagner dès la veille, aux premières vêpres, c’est-à-dire dès samedi prochain immédiatement après-midi. Si le temps est favorable, on dit qu’il y aura beaucoup de pèlerins du Cap, dimanche prochain. »

L'article est tiré des Bases de données en histoire de la Mauricie. Le portrait de Jean Tetzel, une estampe, provient de la bibliothèque numérique Gallica.

Voir aussi sur ce blog : Les Quarante heures, La Bonne Mort et De l'importance d'un jubilé.

samedi 5 janvier 2013

De choses et d'autres

La douzième nuit du cycle de la Nativité, le roman Un homme et son péché et deux décès survenus en décembre 2012 :
  • La nuit des Rois ou de l'Épiphanie est la douzième nuit après celle de Noël. Elle marque la fin du cycle de la Nativité. C'est aussi le titre d'une comédie de William Shakespeare écrite pour être jouée à l'Épiphanie de 1601. Sept ans avant la fondation de la ville de Québec par Samuel de Champlain.
  • Le roman Un homme et son péché de Claude-Henri Grignon, et Les Belles histoires des Pays-d'en-haut qui en découlent, est l'oeuvre de fiction qui a le plus marqué la culture québécoise. On dit Séraphin pour avare, Donalda pour femme soumise, Bidou pour bon à rien et père Laloge pour vieux bonasse. Le site de BANQ présente un parcours thématique sur cette oeuvre.
  • Le 10 décembre 2012, à l'âge de 109 ans et 8 mois, est décédée Clara Saucier. Selon mes données, elle était la personne la plus âgée de la Mauricie au moment de son décès. Le record de longévité pour la région appartient à Julia Houde qui était âgée de 112 ans au moment de son décès le 19 novembre 2006. Clara Saucier était la fille d'Arthur Saucier et d'Anny Elliott. Elle a épousé Hormidas Bronsard le 13 juin 1928 à Shawinigan.
  • Le 27 décembre 2012, à l'âge de 83 ans, est décédé Roger St-Onge, président fondateur de l'Association des descendants de Mathurin Martineau dit Saintonge. Cette association, fondée en 1990, est devenue en 2004 l'Association des Martineau d'Amérique. Il était le fils d'Origène St-Onge et de Lumina Noury. Il a épousé Claire Caron le 5 septembre 1953 à Shawinigan.

vendredi 4 janvier 2013

Les bonbons mélangés

Dans les années 1960, un enfant pouvait se procurer un sac de bonbons mélangés pour 5 ou 10 cents. Il suffisait de demander au dépanneur « 5 cents de bonbons mélangés » en précisant lesquels mettre dans le petit sac de papier brun.

Le bonbon le moins cher était la boule cerise à 6 pour 1 cent, suivi de près par la boule noire à 4 pour 1 cent. Dire que la Monnaie royale canadienne a décidé de retirer de la circulation la pièce de monnaie qui nous a valu tous ces bonbons.

La fameuse boule noire était magique. Elle était dure, impossible de la croquer, et changeait de couleur en fondant. La couche superficielle goûtait la réglisse et tachait la bouche de noir. Venaient ensuite les différentes couleurs qui se succédaient jusqu'à la fonte complète de la boule.

Les grosses gommes casse-gueule, de différentes couleurs, étaient vides à l'intérieur. Il y avait aussi des guimauves à la fraise, des guimauves en forme de banane, des lunes de miel, des bâtons de réglisse rouge ou noire, des poissons rouges ou blancs qui goûtaient fort, des « gommes ballounes » à 1 cent avec un petit comic d'Archie en prime. Pour 5 cents, on achetait de la gomme à mâcher avec des cartes photos de joueurs de hockey, de monstres du cinéma ou des Beatles.

Voir aussi sur ce blog : La grosse boîte rouge de bonbons Viau.

J'ai trouvé la photo des boules noires sur le site de Bonbons Mondoux.