vendredi 29 juillet 2011

Le vrai Ruteboeuf

Léo Ferré (1916-1992)
La très belle chanson Pauvre Ruteboeuf de Léo Ferré (Que sont mes amis devenus) est constituée d'extraits, traduits en français moderne, de deux poèmes de Ruteboeuf (1230-1280) dans lesquels l'auteur se plaint de sa pauvre condition : Le Dit de la Griesche d'hiver et La complainte.  

Mais la traduction de Ferré, qui date de 1955, n'est pas toujours fidèle au texte original. Voici un extrait du Pauvre Ruteboeuf de Ferré :

Et droit sur moi quand bise vente 
Le vent me vient, le vent me vente

Et le texte original du Dit de la Griesche d'hiver qui prend un sens assez différent:

Et froit au cul quant byze vente:
Li vens me vient, li vens m'esvente
Et trop souvent
Plusors foïes sent le vent.

On peut entendre l'interprétation de Ferré sur Youtube. Une dizaine d'autres artistes l'ont chantée dont Joan Baez, dans une version folk, et Claude Dubois, dans une version plus rock.

mercredi 27 juillet 2011

Le gros Kik

On voyait souvent une grosse bouteille de Kik-Cola sur la table des familles ouvrières dans les années 1950 et 1960. C'était moins cher que le lait. Le slogan de la marque était « Le cola des familles » mais on l'appelait aussi le Coke des pauvres parce qu'il coûtait la moitié du prix du Coca-Cola.

C'était une marque de la compagnie américaine Crown Royal. Le Kik-Cola original serait disparu des tablettes au début des années 1980. Les droits sur cette marque appartiennent aujourd'hui à la compagnie américaine Cott qui a racheté la Crown Royal en 2001. On trouve parfois une nouvelle version du Kik-Cola dans les magasins d'aubaines du genre Tigre Géant.

La photo qui suit montre le petit René Van der Poel qui avait gagné un magnifique bobsleigh Kik-Cola lors d'un tirage au dépanneur de Monsieur Alide Desaulniers à Saint-Boniface de Shawinigan en janvier 1965. On aperçoit derrière l'enfant une affiche qui offre deux bouteilles pour seulement 29 cents.

Sur Cyberpresse, le chroniqueur Nelson Dumais présentait ainsi les étiquettes qui étaient accolées aux différentes marques de cola dans les années 1960 :
Le marketing a toujours été un outil de changement sociétal. Quand j’étais petit, cette science du mensonge structuré et étapiste m’avait aidé à bien me situer dans la vie. Pour boire du cola, j’avais le choix entre trois marques. Si j’optais pour Coca-Cola, je faisais partie de ceux qui réussissaient tout ce qu’ils entreprenaient, notamment la séduction des filles. Si je préférais boire un Pepsi-Cola, je m’identifiais à un public moins raffiné, moins sexy, une masse besogneuse fréquentée, en outre, par les durs à cuire. Enfin, si je choisissais un Kik-Cola, je m’accolais l’étiquette portée par les plus miséreux, les vrais économes et les kétaines. Pour vous dire, j’avais une tante qui, en douce, transvidait ses gros Kik dans des bouteilles de Coke juste avant de nous les servir.

dimanche 24 juillet 2011

De mère en fille

 (mise à jour le 15 août 2011)

En généalogie, quand on dresse une lignée ascendante, on suit par convention le patronyme pour arriver au premier ancêtre du nom, Mathurin Matineau dit Saintonge, dans mon cas. C'est l'ascendance patrilinéaire. 

Mais on peut aussi remonter en ligne directe par les femmes, soit la mère, la grand-mère maternelle, la mère de cette dernière et ainsi de suite. C'est l'ascendance matrilinéaire. L'exercice n'est pas dépourvu de sens. Dans la société traditionnelle, les jeunes filles apprenaient de leur maman des valeurs, des façons de faire qui se sont ainsi transmises, de mère en fille, sur plusieurs générations.

Quatre générations de femmes vers 1905

Je me suis amusé à remonter mon ascendance matrilinéaire et suis arrivé, après treize générations, à une Acadienne nommée Genviève Lefranc, épouse d'Antoine Hébert, née dans la paroisse de Balestre à La Haye dans l'Indre-et-Loire vers 1613. En fait, les sept premières générations de mon ascendance matrilinéaire sont acadiennes, ce qui m'a un peu surpris.  C'est peut-être ce qui explique que ma grand-mère maternelle savait si bien préparer le poisson.

Cette ascendance se présente comme suit :
  1. Geneviève Lefranc et Antoine Hébert (mariés vers 1648 en France)
  2. Catherine Hébert et Jacques Leblanc (vers 1673 Acadie)
  3. Marie Leblanc et Alexis Cormier (1697 Acadie)
  4. Marie Cormier et Michel Bourg  (1713 Acadie)
  5. Marie Bourg et Abraham Vigneau (1755 Acadie)
  6. Marie Vigneau et Laurent Cyr (1784 Miquelon)
  7. Félicité Cyr et Joseph Hébert (1809 Saint-Grégoire de Nicolet)
  8. Marie Hébert et Léon Gélinas (1834 Yamachiche)
  9. Adèle Gélinas et Norbert Leclerc (1868 Sainte-Flore). On l'aperçoit assise sur la photo ci-haut.
  10. Azilda Leclerc et Adélard Lavergne (1891 Sainte-Flore)
  11. Blanche Lavergne et Roméo Robitaille (1925 Sainte-Flore)
  12. Simone Robitaille et Hubert Saintonge (1951 Shawinigan).
À la sixième génération, le mariage se situe à Miquelon où les familles de Marie Vigneau et de Laurant Cyr ont été déportées par les Anglais. À la génération suivante, leur fille Félicité Cyr se marie à Saint-Grégoire de Nicolet, un village de la rive Sud du Saint-Laurent qui a été fondé par des réfugiés acadiens à leur retour d'exil.

mercredi 20 juillet 2011

Un tour de machine à la Caillette

Une carte postale qui date du début des années soixante. Elle montre une photographie de l'intérieur d'une véritable institution, le fameux restaurant Caillette qui était situé sur la vieille route 2 (aujourd'hui la 138) à Maskinongé. Il est écrit au verso de la carte : « L'endroit le plus original au Québec - Service chaud et froid ». Elle a été publiée par le Studio St-Cyr de Trois-Rivières.


C'était à l'époque l'une des destinations préférées des familles de la Mauricie lors des « tours de machine » ou ballades en auto du dimanche. On s'y arrêtait pour la crème glacée et autres milk shakes, mais surtout  pour le fromage frais « en crottes ». Le thème de la décoration était très clairement la vache, d'où le nom de Caillette : têtes de vaches qui dodelinaient sur les murs, plancher et comptoirs à motifs de peau de vache, cornes et queues de ruminants pendues au plafond.

Avec le recul, je dirais que c'était évidemment quétaine, mais surtout très amusant. Aussi, le modernisme impressionnait les enfants : l'air climatisé et les portes automatiques qui s'ouvraient toutes seules quand on les approchait étaient des nouveautés au début des années soixante. Sans parler des grosses vaches mécaniques grandeur nature qui se trémoussaient en beuglant.

Voici une seconde carte postale qui présente quatre photos de la Caillette. Le même slogan est écrit au verso : « L'endroit le plus original au Québec ». Cette carte a été publiée par la société UNIC de Montréal.


Ajout  du 15 août 2012 : Le restaurant est ouvert. Il conserve plusieurs éléments de l'ancienne décoration, mais ne porte plus le nom de Caillette.

mardi 12 juillet 2011

L'épopée de Sha8nigan

Gérard Filteau, L'épopée de Sha8nigan, Guertin et Gignac, Shawinigan, 15 mai 1944, 415 pages.

L'épopée de Sha8inigan est l'ouvrage le plus ancien sur l'histoire de la ville fondée en 1901. L'auteur Gérard Filteau (1906-1986) était inspecteur d'écoles dans la région. Il est surtout connu pour son Histoire des Patriotes dont la première édition date de 1938.

Filteau était davantage un conteur qu'un historien. Malgré l'absence de sources écrites sur ces évènements, il nous raconte des guerres qui auraient eu lieu entre les Algonquiens et les Iroquoiens pour le contrôle du Bas-Saint-Maurice avant l'arrivée des Français. Il a peut-être raison sur le fond, mais les détails qu'il nous donne de ces guerres (embuscade à tel endroit, participation de tribus des plaines de l'Ouest !) font sourire. Mais c'est si bien raconté et tellement bien écrit qu'on lui pardonne ce manque de rigueur. Il y a de belles pages sur la nature laurentienne dans ce livre.

Pour ce qui est des faits, les sujets traités par Filteau ont été repris avec plus de précision dans Shawinigan depuis 75 ans de Fabien Larochelle qui est une référence beaucoup plus fiable (voir Du nom Shawinigan sur ce blog). On trouve aussi dans Larochelle des évènements importants qui ont été mis de côté par Filteau, l'émeute de la conscription notamment. J'y reviendrai.

samedi 9 juillet 2011

La mitaine de Maskinongé

Il y a une quinzaine d'années, j'avais rencontré dans le stationnement de l'église de Saint-Joseph de Maskinongé un homme qui construisait une maquette à l'échelle de l'ancienne église. Il moulait les pièces dans une matière plastique qu'il faisait cuire au four dans sa cuisine. J'ai malheureusement oublié son nom mais les habitants du lieu s'en souviennent sûrement.

Il m'avait parlé de la mitaine de Maskinongé. Autrefois, les gens appelaient mitaine les chapelles protestantes. Je crois que c'est une déformation du mot anglais meeting, terme qui désigne l'assemblée des fidèles chez les protestants. En pays catholique, c'étaient généralement des bâtiments en bois plutôt modestes, construits pour accueillir une petite communauté de fidèles. 

La mitaine de Maskinongé a été construite en 1891, à l'époque du conflit qui avait divisé les paroissiens à propos de l'emplacement de la nouvelle église paroissiale. Ceux de la rive Nord qui étaient en désaccord avec l'emplacement choisi par Monseigneur Laflêche avaient décidé de construire leur propre temple, sur le bord de la rivière Maskinongé, en croyant qu'il serait desservi par un prêtre catholique. Devant le refus du diocèse de consacrer la chapelle, une poignée de dissidents s'étaient convertis à la religion évangélique baptiste (voir Le schisme de Maskinongé sur ce blog).

Le croquis ci-haut représente la mitaine de Maskinongé, aussi appelée la chapelle maudite parce qu'un prêtre catholique en colère lui avait jeté une malédiction. Il est tiré de L'histoire de la paroisse Saint-Joseph de Maskinongé de Jacques Casaubon publiée en 1982. La chapelle a été démolie en 1930 après avoir été abandonnée vers 1920.


vendredi 8 juillet 2011

Les timbres Pinky

J'ai trouvé chez un brocanteur un carnet des timbres-primes que ma mère collectionnait dans les années 1960. Les timbres Pinky étaient distribués dans les supermarchés Steinberg. C'était l'équivalent des timbre Goldstar qu'on trouvait dans le épiceries Métro et IGA (voir Les timbres Goldstar sur ce blog). Les timbres Pinky ont aussi été offerts par d'autres commerces, notamment dans des stations-service de la région de Montréal


Ces objets faisaient partie du quotidien des mamans des baby-boomers, une génération de femmes nées entre les deux guerres mondiales (1919-1938).

Après avoir dominé le marché de l'alimentation au Québec pendant les années cinquante et soixante, Steinberg n'a pas réussi à concurrencer les regroupements d'épiciers indépendants (Provigo, Métro-Richelieu, IGA) qui s'étaient formés pour lui tenir tête. Gaétan Frigon, qui a été PDG de la chaîne de dépanneurs La Maisonnée, explique sur son blog l'erreur de marketing qui a finalement causé la perte des supermarchés Steinberg dans les années 1980. L'article s'intitule L'art de creuser sa propre tombe.

On trouve aussi sur le blog de Gaétan Frigon un texte qui explique comment s'est développé le regroupement d'épiciers Métro-Richelieu, la seule grande chaîne qui demeure sous contrôle québécois après les acquisitions de Provigo par Loblaw et de IGA par Sobey's.

jeudi 7 juillet 2011

L'amour chez les criocères

Le criocère du lis (Lilloceris lilii) est un petit coléoptère, cousin de la coccinelle, très photogénique avec ses élytres d'un rouge vif. Mais c'est un véritable fléau qui est responsable de la quasi disparition des lis de nos jardins. Les adultes perforent les feuilles jusqu'à défolier complètement les plants. Les larves rongent aussi les bourgeons floraux et les fleurs.


Cette petite peste a été introduite d'Europe. Elle aurait été signalée pour la première fois à Montréal en 1945 et s'est ensuite répandue lentement dans le sud du Québec. Elle fait des ravages dans les jardins de la ville de Québec depuis une quinzaine d'années.


Confucius (551-479 avant Jésus-Christ) disait avec raison qu'une image vaut mille mots.

Les photos sont d'Adrienne.

Voir aussi sur ce blog L'insecte qui reluit.