lundi 26 mai 2008

La croix du Grand Quatre

La croix de chemin du Grand Quatre à Saint-Boniface de Shawinigan a été enlevée. Le propriétaire m'a fait remettre la plaque de cuivre qui était fixée à son montant parce qu'il m'avait déjà vu en noter les inscriptions.

Cette croix avait été érigée en 1941 par onze fermiers des alentours, les grands-pères et les arrière-grands-pères des familles qui habitent encore le rang aujourd'hui. Leurs noms sont gravés sur la plaque : Léo Matteau, Rosaire Chainé, Alphonse E. Gélinas, Camille A. Gélinas, Adélard Chainé, Alphonse Chainé, Adélard Lacerte, Amédée Chainé, Georges Lampron, Claudio Lampron, Elzéar Chainé.

C'était une de ces croix de chemin en bois plantées directement dans la terre et que l'on remplaçait pieusement, à tous les vingt ou trente ans, lorsque la base était pourrie. À ma connaissance, celle du Grand Quatre avait été restaurée par des voisins vers la fin des année soixante-dix. Elle était sûrement faite en cèdre pour durer aussi longtemps.

Elle marquait l'intersection du Rang Quatre avec l'ancienne route qui reliait le village de Saint-Boniface à la ville de Shawinigan. En 1949, cette route a été déplacée de quelques centaines de mètres vers l'est. Il n'y avait donc plus d'intersection à marquer depuis très longtemps. La croix du Grand Quatre était ainsi devenue une croix sans chemin, une orpheline en quelque sorte.


samedi 24 mai 2008

L'enfant est partie

À ma belle Gabrielle qui est partie découvrir le monde avec l'enthousiasme et l'insouciance de ses dix-neuf ans, ce poème d'Hector Saint-Denis-Garneau intitulé Portrait. Tiré du recueil "Regards et jeux dans l'espace" publié à Montréal en 1937, il traite de l'absence et peut-être bien aussi de l'enfant qui dit-on est en chacun de nous.




PORTRAIT


C'est un drôle d'enfant
C'est un oiseau
Il n'est plus là
Il s'agit de le trouver
De le chercher
Quand il est là
Il s'agit de ne pas lui faire peur
C'est un oiseau
C'est un colimaçon.
Il ne regarde que pour vous embrasser
Autrement il ne sait pas quoi faire avec ses yeux
Où les poser
Il les tracasse comme un paysan sa casquette
Il lui faut aller vers vous
Et quand il s'arrête
Et s'il arrive
Il n'est plus là
Alors il faut le voir venir
Et l'aimer durant son voyage.



En passant, on peut trouver les poèmes de Saint-Denis-Garneau sur un très beau site consacré à la poésie francophone à l'adresse suivante : http://lapoesiequejaime.net/


Voir aussi sur ce blog : Cage d'oiseau, un autre poème de Saint-Denis-Garneau